Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence : Idahosa c. Canada  (Agence des services frontaliers du Canada),  2014 CRAC 28

 

 

 

 

Date : 20141010

Dossier : CART/CRAC‑1751

 

 

 

 

ENTRE :

 

 

 

 

 

 

 

Helen Evbaguehikha Idahosa, demanderesse

 

 

 

 

‑ et ‑

 

 

 

 

Agence des services frontaliers du Canada, intimée

 

 

 

 

[Traduction de la version officielle en anglais]

 

DEVANT :

Le président Donald Buckingham

 

 

 

 

 

 

 

 

AVEC :

Helen Idahosa, pour son propre compte; et

 

Mélanie A. Charbonneau, représentante de l’intimée

 

 

 

 

 

 

 

 

Affaire concernant une demande de révision des faits que la demanderesse a présentée en vertu de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, relativement à une présumée violation par l’intimée de l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux.

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                     DÉCISION

 

 

 

 

À la suite d’une audience et après avoir examiné toutes les observations orales et écrites présentées par les parties, la Commission de révision agricole du Canada statue, par ordonnance, selon la prépondérance des probabilités, que la demanderesse a commis la violation qui lui est reprochée dans l’avis de violation nYYZ4974‑0757, daté du 7 décembre 2013, et qu’elle est tenue de payer à l’intimée le montant de la sanction établi à 800 $ dans les trente (30) jours suivant la date de la signification de la présente décision.

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario),

 

 

le mardi 26 août 2014.


 Montréal, QC

 

MOTIFS

 

Incident reproché, dispositions législatives pertinentes et questions à trancher

 

[1]              Le cœur du présent litige concerne 600 cubes de bouillon de poulet « Maggi » vendus dans des sachets sous l’appellation commerciale « Cubes de poulet Knorr ». La demanderesse, Helen Evbaguehikha Idahosa (Mme Idahosa), aurait acquis les cubes Maggi alors qu’elle se trouvait à l’extérieur du Canada en voyage au Nigéria. L’intimée, l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence), affirme, à la suite de la découverte des cubes Maggi dans les bagages de Mme Idahosa à l’aéroport international Pearson (l’aéroport Pearson) de Toronto (Ontario), le 7 décembre 2013, que Mme Idahosa a importé au Canada des produits de la viande, en contravention de l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux (le Règlement SA) en provenance du Nigéria, pays d’où il est illégal d’importer des produits de la viande sans avoir respecté les dispositions applicables de la partie IV du Règlement SA intitulée « Importation de sous-produits animaux, d’agents zoopathogènes et autres ».

 

[2]              Les dispositions législatives applicables de la Partie IV du Règlement SA sont ainsi libellées :

 

40.  Il est interdit d’importer un sous-produit animal, du fumier ou une chose contenant un sous-produit animal ou du fumier, sauf en conformité avec la présente partie.

 

41(1) Il est permis d’importer un sous-produit animal, du fumier ou une chose contenant un sous-produit animal ou du fumier autres que ceux visés aux articles 45, 46, 47, 47.1, 49, 50, 51, 51.2 et 53, si l’une des conditions suivantes est remplie :

 

a) le pays d’origine est les États-Unis et le sous-produit, le fumier ou la chose ne provient pas d’un animal de la sous-famille Bovinae ou Caprinae;

 

b) le pays d’origine, ou la partie de ce pays d’origine, est désigné, en vertu de l’article 7, comme étant exempt ou comme posant un risque négligeable de toute maladie déclarable, de toute maladie mentionnée à l’annexe VII et de toute épizootie grave que l’espèce de laquelle provient le sous-produit, le fumier ou la chose est susceptible de contracter et qui peut être transmise par eux, auquel cas l’importateur présente un certificat d’origine signé par un fonctionnaire du gouvernement de ce pays attestant de cette origine;

 

c) le sous-produit, le fumier ou la chose a été recueilli, traité, préparé, transformé, entreposé et manipulé de manière à prévenir l’introduction de toute maladie déclarable, de toute maladie mentionnée à l’annexe VII et de toute épizootie grave que l’espèce de laquelle il provient est susceptible de contracter et qui peut être transmise par lui, auquel cas l’importateur présente un certificat signé par un fonctionnaire du gouvernement du pays d’origine qui :

 

(i) atteste que le sous-produit, le fumier ou la chose a été recueilli, traité, préparé, transformé, entreposé et manipulé de cette manière,

 

(ii) expose en détail comment il a été recueilli, traité, préparé, transformé, entreposé et manipulé.

 

(2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas au fumier se trouvant dans ou sur un véhicule en provenance des États-Unis, s’il provient d’animaux, autres que des porcs, qui sont transportés à bord du véhicule.

 

41.1 (1)  Malgré l’article 41, il est permis d’importer un sous-produit animal ou une chose contenant un sous-produit animal, autres que ceux visés aux articles 45, 46, 47, 47.1, 49, 50, 51, 51.2 et 53, si l’inspecteur a des motifs raisonnables de croire que l’importation du sous-produit ou de la chose, par sa nature, sa destination ou sa transformation, n’entraînera pas — ou qu’il est peu probable qu’elle entraîne — l’introduction de toute maladie déclarable, de toute maladie mentionnée à l’annexe VII et de toute épizootie grave que l’espèce de laquelle il provient est susceptible de contracter et qui peut être transmise par lui, pourvu que le sous-produit ou la chose ne soit pas destiné à servir d’aliments pour animaux ou d’ingrédient pour de tels aliments.

 

(2) Il est interdit d’utiliser ou de faire en sorte que soit utilisé un sous-produit animal ou une chose contenant un sous-produit animal importé conformément au paragraphe (1) comme aliments pour animaux ou comme ingrédient pour de tels aliments.

 

[…]

 

43.  Il est permis d’importer du bœuf désossé et cuit d’un pays non visé à l’article 41, ou d’une partie d’un tel pays, si les conditions suivantes sont réunies :

*       a) le bœuf a été traité à un endroit et d’une façon approuvés par le ministre;

*       b) il est accompagné d’un certificat d’inspection des viandes d’un vétérinaire officiel du pays exportateur en la forme approuvée par le ministre;

*       c) après examen, un inspecteur est convaincu que le bœuf est parfaitement cuit.

[…]

 

46. Il est interdit d’importer de la farine de viande et d’os, de la farine d’os, de la farine de sang, des résidus de graisse (farine de viande), de la farine de plumes, de la farine de poisson ou tout autre produit d’une usine de traitement, à moins que, en plus des exigences des articles 166 à 171, les conditions suivantes ne soient réunies :

*                a) le pays d’origine, ou la partie de ce pays d’origine, est désigné, en vertu de l’article 7, comme étant exempt ou comme posant un risque négligeable de toute maladie déclarable, de toute maladie mentionnée à l’annexe VII et de toute épizootie grave que l’espèce de laquelle provient le produit est susceptible de contracter et qui peut être transmise par lui, auquel cas l’importateur présente un certificat d’origine signé par un fonctionnaire du gouvernement de ce pays attestant de cette origine;

*                b) l’inspecteur a des motifs raisonnables de croire que le produit a été traité de manière à prévenir l’introduction de toute maladie déclarable, de toute maladie mentionnée à l’annexe VII et de toute épizootie grave que l’espèce de laquelle il provient est susceptible de contracter et qui peut être transmise par lui.

 

[…]

 

*       52. (1) Malgré toute autre disposition de la présente partie, il est permis d’importer un sous-produit animal si l’importateur présente un document qui expose en détail le traitement qu’a subi le sous-produit et que l’inspecteur a des motifs raisonnables de croire, d’après la provenance du document, les renseignements qui y figurent et tout autre renseignement pertinent dont il dispose, ainsi que les résultats de l’inspection du sous-produit, au besoin, que l’importation de celui-ci n’entraînera pas — ou qu’il est peu probable qu’elle entraîne — l’introduction ou la propagation d’un vecteur, d’une maladie ou d’une substance toxique.

*       (2) Malgré toute autre disposition de la présente partie, il est permis d’importer un sous-produit animal aux termes d’un permis délivré par le ministre en vertu de l’article 160.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[3]              La Commission de révision agricole du Canada (la Commission) doit déterminer si l’Agence a établi les éléments requis à l’appui de l’avis de violation contesté et, dans l’hypothèse où Mme Idahosa a effectivement importé de la viande au Canada, si elle s’est conformée aux exigences qui auraient permis une telle importation.

 

 

Historique procédural

 

[4]              L’avis de violation nYYZ4974‑0757, signé et daté du 7 décembre 2013, allègue qu’à l’aéroport Pearson, Mme Idahosa [traduction] « a commis une violation, à savoir importer un sous-produit animal, soit de la viande, sans se conformer aux exigences prévues, contrairement à l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux », ce qui constitue une violation à l’article 7 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (la Loi sur les SAP) et à l’article 2 du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (le Règlement sur les SAP).

 

[5]              Le 7 décembre 2013, l’Agence a signifié à personne à Mme Idahosa un avis de violation infligeant une sanction. L’avis de violation informait Mme  Idahosa que la violation reprochée constituait une « violation grave » au sens de l’article 4 du Règlement sur les SAP pour laquelle la sanction était une pénalité de 800 $.

 

[6]              Par lettre datée du 8 décembre 2014 envoyée par télécopieur le 11 décembre 2013, Mme Idahosa a demandé à la Commission d’effectuer une révision (la demande de révision) en vertu de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les SAP. Mme Idahosa a informé le personnel de la Commission qu’elle souhaitait procéder au moyen d’une audience en anglais, conformément au paragraphe 15(1) du Règlement sur les SAP. À la demande du tribunal, et pour que celui-ci se prononce sur la recevabilité de sa demande de révision, Mme Idahosa a envoyé le 26 janvier 2014 une lettre (qui a été télécopiée à la Commission le 27 janvier 2014) dans laquelle elle exposait des motifs supplémentaires (les motifs supplémentaires) à l’appui de sa demande de révision. Sur le fondement de ces observations, la Commission a jugé la demande de révision recevable et a demandé à l’Agence de déposer son rapport au sujet de l’incident.

 

[7]              Le 27 février 2014, l’Agence a fait parvenir des copies de son rapport (le rapport de l’Agence) concernant l’avis de violation à Mme Idahosa et à la Commission, qu’il a reçues le même jour.

 

[8]              Dans une lettre datée du 28 février 2014, la Commission a invité Mme Idahosa et l’Agence à déposer leurs observations complémentaires au plus tard le 31 mars 2014. Ni Mme Idahosa ni l’Agence n’ont déposé d’autres observations avant l’audience.

 

[9]              Par lettre datée du 20 juin 2014, la Commission a avisé les parties que l’examen de l’affaire aurait lieu à Toronto (Ontario) le 26 août 2014.

 

[10]         L’audience réclamée par Mme Idahosa a eu lieu à Toronto (Ontario), le 26 août 2014 en présence des deux parties. Mme Idahosa se représentait elle-même et l’Agence était représentée par Mme Mélanie A. Charbonneau (Mme Charbonneau). Après son exposé introductif, Mme Charbonneau a informé la Commission que le témoin qu’elle avait l’intention de faire entendre n’était pas présent. La Commission a alors fait témoigner Mme Idahosa. Après avoir entendu son témoignage, la Commission a demandé s’il y avait d’autres témoins, ce à quoi les parties ont répondu par la négative. Quelques minutes plus tard, le témoin de l’Agence, l’inspecteur 14747, est arrivé à la salle d’audience et Mme Charbonneau a présenté à la Commission une requête en vue de faire entendre ce témoin. Mme Idahosa s’est opposée à cette requête. La Commission a entendu les observations de Mme Charbonneau et de Mme Idahosa. Après avoir entendu ces arguments, la Commission a refusé d’entendre le témoignage de l’inspecteur 14747. Le délai prescrit pour la présentation des témoins de l’Agence était expiré et il n’existait aucune raison impérieuse de rouvrir l’audience pour entendre le témoin de l’Agence, d’autant plus que le témoin proposé par l’Agence avait déjà soumis des éléments de preuve clairs et détaillés par écrit dans le rapport de l’Agence qui avaient déjà été versés au dossier de l’affaire.

 

[11]         Au cours des observations finales présentées à l’audience, Mme Charbonneau s’est engagée à fournir plus tard à Mme Idahosa et à la Commission des décisions dans lesquelles la Commission avait déjà examiné la question de savoir si des cubes Maggi contenaient de la viande. Le 3 septembre 2014, Mme Charbonneau a fait parvenir par lettre à la Commission et à Mme Idahosa trois décisions de la Commission – Acevedo c. Canada (ASFC), 2012 CRAC 15, Abdul‑Aziz c. Canada (Agriculture et Agroalimentaire), 2012 CRAC 24 et Martinez c. Canada (ACIA), RTA no 60077, en ajoutant toutefois des arguments complémentaires à sa lettre. Par conséquent, la Commission a, le 15 septembre 2014, invité Mme Idahosa à répondre au plus tard le 30 septembre 2014 par écrit aux décisions et aux arguments soumis par Mme Charbonneau. Mme Idahosa n’avait donné aucune réponse en date du 30 septembre 2014.

 

 

La preuve

 

[12]         La preuve présentée à la Commission en l’espèce consiste en des observations écrites soumises par l’Agence (l’avis de violation daté du 7 décembre 2013, ainsi que le rapport du 27 février 2014 de l’Agence) et par Mme Idahosa (les observations contenues dans sa demande de révision du 8 décembre 2013 ainsi que dans ses motifs complémentaires du 26 janvier 2014) ainsi que le témoignage donné par Mme Idahosa à l’audience. L’Agence n’a pas convoqué de témoins à l’audience pour les motifs déjà exposés, tandis que Mme Idahosa n’a fait entendre qu’une seule personne à l’audience, elle-même, le 26 août 2014.

 

[13]         L’Agence a soumis les éléments de preuve suivants dans les documents contenus dans le rapport de l’Agence qui portent sur les faits suivants :

 

         Mme Idahosa est arrivée à l’aéroport Lester B. Pearson le 7 décembre 2013 (carte de déclaration douanière E311 de l’Agence des services frontaliers du Canada (la carte de déclaration) (onglet 1 du rapport de l’Agence).

 

         Mme Idahosa a rempli et signé la carte de déclaration le 7 décembre 2013. Elle a coché la case « non » vis-à-vis l’énoncé : « J’apporte (nous apportons) au Canada : viande ou produits à base de viande; produits laitiers; fruits; légumes; semences; noix; plantes et animaux, parties d’animaux; fleurs coupées; terre; bois ou produits du bois; oiseaux; insectes » (carte de déclaration douanière, onglet 1 du rapport de l’Agence).

 

         Après avoir franchi le poste d’inspection primaire, Mme Idahosa a été repérée par un contrôleur de l’Agence en vue d’une inspection secondaire. L’inspecteur 14747 a procédé à l’inspection secondaire. Suivant son rapport, il a demandé à Mme Idahosa si elle avait des aliments ou des grignotines. Elle lui a répondu qu’elle n’avait que des biscuits et des petits gâteaux provenant de l’avion. L’inspecteur 14747 a expliqué qu’il avait dit à Mme Idahosa qu’elle devait déclarer tous les biens qu’elle avait achetés, reçus ou acquis alors qu’elle se trouvait à bord de l’avion. Toutefois, après avoir inspecté les bagages de Mme Idahosa, l’inspecteur 14747 a découvert 600 cubes Maggi en 12 sachets. Mme Idahosa a déclaré à l’inspecteur 14747 qu’elle croyait qu’elle ne devait déclarer que la viande qui était destinée à la revente. De plus, l’inspecteur 14747 a relaté dans son rapport que Mme Idahosa lui a déclaré que les cubes n’étaient ni de la viande ni des aliments. Interrogée quant à savoir si elle avait un permis ou un certificat pour ces produits, elle a répondu par la négative. Lorsque l’inspecteur 14747 lui a expliqué qu’elle avait l’obligation de déclarer toutes les marchandises qu’elle avait en sa possession, à défaut de quoi elle s’exposait à des pénalités, Mme Idahosa a répondu qu’elle était une mère monoparentale avec quatre enfants et que les cubes Maggi coûtaient trop cher au Canada.

 

         Lors de son inspection, il a découvert que Mme Idahosa avait en sa possession un produit de la viande non déclaré, en l’occurrence des cubes Maggi au poulet, comme l’indiquent les photos prises par l’inspecteur 14747, onglet 5 du rapport de l’Agence.

 

         L’inspecteur 14747 a indiqué dans un document intitulé [traduction] « Rapport SAP sous‑produits animaux/produits végétaux SAP no YYZ4974‑0757 » que Mme Idahosa n’avait pas de permis ou de certificat pour les produits importés et que, sans ces documents, l’inspecteur ne pouvait être convaincu, pour des motifs raisonnables, que le traitement qu’avait subi les cubes de poulet n’empêcherait pas l’introduction d’une maladie au Canada « Rapport SAP sous‑produits animaux/produits végétaux SAP no YYZ4974‑0757 » rempli par l’inspecteur 14747, onglet 4 du rapport de l’Agence).

 

         L’inspecteur 14747 a signalé que les marchandises en question présentaient une menace pour l’agriculture canadienne. Il estimait que les cubes de poulet pouvaient receler la maladie de Newcastle ou la grippe aviaire. De plus, après avoir consulté le système automatisé de référence à l’importation (le SARI) de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (l’ACIA), il a estimé que les produits de la viande (les cubes de poulet) provenant du Nigéria qu’il avait trouvés en la possession de Mme Idahosa devaient être interdits d’accès au Canada à moins d’être accompagnés d’un certificat d’exportation délivré par un fonctionnaire (rapport de l’ACIA, onglet 3, du rapport de l’Agence et le « Rapport de l’inspecteur sur la non-observation des formalités des voyageurs aux points d’entrée, onglet 4 du Rapport de l’Agence).

 

[14]         Voici ce qu’on trouve notamment dans la preuve écrite présentée par Mme Idahosa dans sa demande de révision du 8 décembre 2013 [traduction] :

 

[…]

 

 [...] c’est la première fois que je voyage depuis quinze (15) ans et j’ignorais qu’une épice que nous appelons « épice à poulet Maggi » au Nigéria que j’avais en ma possession était interdite au Canada et serait considérée comme un animal. J’achète toujours la même marque ici au Canada pour la cuisson, toujours la même chose. Je ne l’achète pas dans un but commercial, mais pour ma consommation personnelle et pour celle de mes enfants […] J’ai coché « NON » sur le formulaire qu’on m’a remis dans l’avion parce qu’on m’a expliqué à bord qu’on voulait parler seulement de bœuf et que la viande n’est pas une saveur et qu’il s’agissait de fins commerciales. J’avais avec moi une épice à saveur de poulet destinée à ma consommation personnelle. Même si ce produit n’est pas autorisé au Canada, je crois qu’on aurait dû me prévenir et non me condamner à une amende dès la première fois.

 

[…]

 

[15]         Dans ses observations complémentaires présentées par lettre datée du 26 janvier 2014, Mme Idahosa ajoute ce qui suit [traduction] :

 

[…]

 

[...] J’avais en ma possession 20 sachets de cubes de poulet Maggi Knorr et trois tubercules d’ignames. Les cubes de poulet Maggi Knorr ne contiennent pas de vraie viande, mais seulement des cubes à saveur de poulet, et les tubercules d’ignames ne contiennent aucune viande. Je ne comprends pas pourquoi on me condamne à une amende et je ne vois pas en quoi j’ai violé le règlement sur la santé et les animaux.

[…]

 

[16]         Dans son témoignage, Mme Idahosa a expliqué que le but de son voyage était d’aller visiter sa mère mourante. Pendant qu’elle était là‑bas, elle a acheté les cubes Maggi qui ont une saveur animale sans toutefois se rendre compte qu’elle devait peut-être les déclarer à son retour au Canada. Elle a expliqué qu’elle avait coché « Non » à la question posée sur la carte de déclaration quant à savoir si elle importait de la viande ou des produits de la viande en raison des conseils qu’elle avait reçus d’un compagnon passager qui lui avait dit qu’elle n’avait pas besoin de déclarer les produits qu’elle apportait avec elle. Lorsque l’inspecteur lui a dit qu’elle ne pouvait apporter les cubes Maggi au Canada, elle lui a demandé la permission de les jeter aux poubelles, ce qu’il a refusé. Mme Idahosa a expliqué à la Commission qu’elle ne comprenait pas ce refus, étant donné qu’elle achetait le même produit au Canada qui se vendait moins cher au Nigéria, ajoutant qu’elle avait une grande famille et qu’elle voulait épargner de l’argent en achetant les cubes Maggi au Nigéria et les apporter au Canada.

 

[17]         En contre-interrogatoire, Mme Idahosa a admis qu’elle avait acheté des cubes Maggi au Nigéria et qu’elle ne les avait pas déclarés sur sa carte de déclaration parce qu’elle avait consulté l’agente de bord qui lui avait dit qu’il n’était pas nécessaire de les déclarer. Mme Idahosa a expliqué qu’elle avait mentionné qu’elle avait des aliments et des vêtements au premier inspecteur des douanes qu’elle avait rencontré au point de contrôle secondaire, mais elle a expliqué que ce premier inspecteur se trouvait dans la zone d’inspection secondaire ou un troisième inspecteur avait finalement découvert les cubes Maggi qu’elle transportait.

 

 

Analyse et dispositions législatives applicables

 

[18]         Le mandat de la Commission consiste à déterminer la validité des sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire infligées sous le régime de la Loi sur les SAP. L’objet de la Loi sur les SAP est énoncé à l’article 3 :

 

3.  La présente loi a pour objet d’établir, comme solution de rechange au régime pénal et complément aux autres mesures d’application des lois agroalimentaires déjà en vigueur, un régime juste et efficace de sanctions administratives pécuniaires.

 

[19]         À l’article 2 de la Loi sur les SAP, le terme « loi agroalimentaire » est défini comme suit :

 

« loi agroalimentaire » La Loi sur les produits agricoles au Canada, la Loi sur la médiation en matière d’endettement agricole, la Loi relative aux aliments du bétail, la Loi sur les engrais, la Loi sur la santé des animaux, la Loi sur l’inspection des viandes, la Loi sur les produits antiparasitaires, la Loi sur la protection des végétaux ou la Loi sur les semences.

 

[20]         En vertu de l’alinéa 4(1)a) de la Loi sur les SAP, le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire ou le ministre de la Santé, selon le cas, peut, par règlement :

 

désigner comme violation punissable au titre de la présente loi la contravention — si elle constitue une infraction à une loi agroalimentaire :

 

(i) aux dispositions spécifiées d’une loi agroalimentaire ou de ses règlements,

 

[21]         Le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire a pris un tel règlement, soit le Règlement sur les SAP, qui définit comme des violations certaines infractions à des dispositions de la Loi sur la santé des animaux (la LSA) et du Règlement sur la santé des animaux (le Règlement SA), ainsi que de la Loi sur la protection des végétaux et du Règlement sur la protection des végétaux. Ces violations sont énumérées à l’annexe 1, partie 1, section 2 du Règlement sur les SAP, qui précise la qualification, ou le degré de gravité, que les organismes chargés de l’application de la loi et la Commission doivent attribuer à une violation de l’article 40 du Règlement SA :

 

Article      Article du                  Description abrégée                        Classification

                  Règl. SA

79.             40                                Importer un sous-produit animal

sans se conformer aux exigences                  grave

                                                prévues

 

[22]         Le régime de sanctions administratives pécuniaires établi par le législateur au moyen la Loi sur les SAP est d’application très stricte. La Cour d’appel fédérale décrit ce régime comme suit dans l’arrêt Doyon c. Procureur général du Canada (Doyon), 2009 CAF 152, aux paragraphes 27 et 28 :

 

[27] En somme, le régime de sanctions administratives pécuniaires a importé les éléments les plus punitifs du droit pénal en prenant soin d’en écarter les moyens de défense utiles et de diminuer le fardeau de preuve du poursuivant. Une responsabilité absolue, découlant d’un actus reus que le poursuivant n’a pas à établir hors de tout doute raisonnable, laisse au contrevenant bien peu de moyens de disculpation.

 

[28] Aussi, le décideur se doit-il d’être circonspect dans l’administration et l’analyse de la preuve de même que dans l’analyse des éléments constitutifs de l’infraction et du lien de causalité. Cette circonspection doit se refléter dans les motifs de sa décision, laquelle doit s’appuyer sur une preuve qui repose sur des assises factuelles et non sur de simples conjectures, encore moins de la spéculation, des intuitions, des impressions ou du ouï-dire.

 

[23]         Dans l’arrêt Doyon, la Cour d’appel fédérale a également souligné que la Loi sur les SAP impose un lourd fardeau à l’Agence. Au paragraphe 20, la Cour déclare :

 

[20] Enfin, et il s’agit là d’un élément important de toute poursuite, la charge de la preuve d’une violation appartient au ministre ainsi que le fardeau de persuasion. Il doit établir selon la prépondérance des … [probabilités] la responsabilité du contrevenant : voir l’article 19 de la Loi.

 

[24]         L’article 19 de la Loi sur les SAP est ainsi libellé :

 

19.  En cas de contestation devant le ministre ou de révision par la Commission, portant sur les faits, il appartient au ministre d’établir, selon la prépondérance des probabilités, la responsabilité du contrevenant.

 

[25]         Il incombe donc à l’Agence de prouver, selon la prépondérance des probabilités, l’ensemble des éléments d’une violation qui sont à la base de l’avis de violation. S’agissant d’une violation de l’article 40 du Règlement SA, l’Agence doit prouver que :

 

         Mme Idahosa est la personne qui a commis la violation;

 

         Mme Idahosa a importé un sous-produit animal, en l’occurrence des cubes « Maggi » saveur poulet, au Canada.

 

[26]         La Commission doit examiner l’ensemble des éléments de preuve qui lui ont été présentés, que ce soit par écrit ou de vive voix, afin de déterminer si l’Agence a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, chacun des éléments de la violation alléguée.

 

[27]         En ce qui a trait au premier élément, en l’occurrence, l’identité de Mme Idahosa en tant que présumé auteur de la violation, son identité n’est pas contestée. Tout au long du processus d’inspection secondaire, l’identité de Mme Idahosa, en tant qu’auteure présumée de la violation, et l’identité de la personne ayant le soin, le contrôle et la propriété des cubes « Maggi » saveur poulet de marque Knorr ont été prouvées, selon la prépondérance des probabilités. En fait, la Commission tient pour avéré que Mme Idahosa était la contrevenante présumée identifiée par l’inspecteur 14747, et que les produits trouvés dans sa valise pouvaient, à juste titre, lui être attribués.

 

[28]         La seule question à trancher dans la présente affaire concerne la preuve du second élément. L’Agence a‑t‑elle démontré, selon la prépondérance des probabilités, que les cubes de bouillon de poulet Maggi de marque Knorr constituent un sous-produit animal?

 

[29]         Par le passé, la Commission a été confrontée à plusieurs reprises à des situations dans lesquelles elle était appelée à déterminer si un produit contenait de la viande ou un sous‑produit animal (voir Taylor c. Canada (ASFC), 2010 CRAC 32; Yan c. Canada (ASFC), 2013 CRAC 26; Tao c. Canada (ASFC), 2013 CRAC 16; Mak c. Canada (ASFC), 2013 CRAC 11).

 

[30]         En ce qui concerne un produit appelé « cubes Maggi », Mme Charbonneau a fait valoir que la Commission avait déjà tranché la question et qu’il lui suffisait d’appliquer les conclusions qu’elle avait déjà tirées. Elle a invoqué trois décisions – Vargas, Abdul‑Aziz et Martinez – dans lesquelles les présumés contrevenants avaient effectivement parmi les produits qu’ils avaient importés certains cubes de poulet. Toutefois, dans chacune de ces trois affaires, en plus des cubes de poulet, les présumés contrevenants avaient également parmi les produits qu’ils avaient importés de la viande au sens strict du terme (Vargas avait 500 g de salami, Abdul‑Aziz avait du bœuf et Martinez avait huit livres de viande). Dans aucune de ces décisions, la Commission n’a conclu que les « cubes Maggi » ou « cubes de poulet » constituaient eux‑mêmes un « sous-produit animal » au sens du Règlement SA.

 

[31]         Suivant la Commission, lorsque les cubes Maggi sont le seul motif invoqué pour conclure à une violation de l’article 40 du Règlement SA, l’agent a l’obligation de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’effectivement les cubes Maggi constituent un « sous-produit animal ». La jurisprudence antérieure de la Commission ne permet pas de répondre de façon catégorique à cette question. En quoi consiste donc en l’espèce la preuve suivant laquelle les cubes Maggi constituent ou non un sous-produit animal?

 

[32]         L’inspecteur 14747 a expliqué dans les documents qu’il a rédigés, à l’onglet 4, ainsi que dans les photos présentées à l’onglet 5, que les produits en question étaient des sous-produits animaux, en l’occurrence du gras de poulet ou de la viande. Mme Idahosa maintient que les cubes de poulet Maggi de marque Knorr ne constituent pas de la viande et, par extension, ne constituent pas des sous-produits animaux. Mme Charbonneau affirme que l’évaluation que l’inspecteur a faite des produits en question et sa mention du système SARI pour décider s’il devrait être autorisé au Canada suffisait pour conclure que les cubes Maggi sont effectivement des sous-produits animaux.

 

[33]         L’Agence aurait pu faire un travail beaucoup plus minutieux et appliqué lors de la présentation de sa preuve pour démontrer que les cubes Maggi contiennent effectivement du gras animal ou de la viande et constituent de ce fait un sous-produit animal. Un simple examen de l’étiquette du produit et une énumération des ingrédients dans le rapport de l’inspecteur ou encore une photo de la liste d’ingrédients auraient suffi pour fournir ces renseignements. Une analyse scientifique plus poussée aurait également fourni une preuve concluante que le produit contenait effectivement du gras animal et constituait donc un sous-produit animal.

 

[34]         En revanche, Mme Idahosa n’a pas produit le moindre élément de preuve, comme une étiquette de produit ou une liste d’ingrédients d’un produit semblable qu’elle aurait acheté au Canada pour démontrer que le produit ne contenait aucun gras animal ou viande de sorte qu’il ne constituerait pas un sous-produit animal. Ce genre de preuve aurait constitué une preuve solide à l’appui de sa position que les cubes Maggi ne contenaient pas de viande et ne constituaient donc pas un sous-produit animal.

 

[35]         Compte tenu du témoignage et de l’opinion de l’inspecteur 14747, la Commission conclut, selon la prépondérance des probabilités, que les cubes de poulet Maggi de marque Knorr contiennent effectivement du gras animal et constituent effectivement un sous-produit animal. Cette conclusion s’accorde avec le fait que conclure autrement donnerait à penser qu’une grande entreprise multinationale qui fabrique ce produit appose des étiquettes erronées sur un produit qui identifie clairement le poulet comme principal ingrédient ou encore qu’elle fait des fausses publicités à ce sujet. Il serait étrange qu’un tel produit soit commercialisé de façon équitable s’il ne contenait aucune viande de poulet, aucun gras de poulet ou aucun sous-produit du poulet.

 

 

Moyens de défense dont dispose Mme Idahosa

 

[36]         Il ne fait aucun doute que tout auteur présumé d’une violation à l’article 40 du Règlement SA peut se défendre en produisant des éléments de preuve établissant qu’il s’est conformé aux exigences prévues à la partie IV du Règlement SA. Toutefois, il incombe au contrevenant présumé de convaincre l’Agence, ou, le cas échéant, la Commission, qu’il s’est conformé aux exigences prévues à la partie IV, et le contrevenant doit prendre tous les moyens nécessaires et raisonnables pour se disculper. En règle générale, la justification prend l’une ou l’autre des formes suivantes :

 

         soit que le voyageur déclare des sous-produits animaux à l’Agence, par écrit sur la carte de déclaration ou en personne à l’agent des douanes une fois qu’il est descendu de l’avion et qu’il se trouve à un point d’entrée, afin qu’un inspecteur de l’Agence puisse examiner le produit et permettre ou non l’importation de ce produit au Canada en vertu de l’alinéa 41(1)a) ou du paragraphe 41.1(1) du Règlement SA;

 

         soit que le voyageur présente un certificat (alinéa 41(1)b); alinéa 41(1)c); section 43; article 46), un document (paragraphe 52(1)) ou un permis (paragraphe 52(2)) qui permet l’importation du produit de viande au Canada conformément à la partie IV du Règlement SA.

 

[37]         Malheureusement, Mme Idahosa n’a soulevé aucun moyen visant à justifier l’importation, conformément à la partie IV du Règlement SA. Bien qu’elle ait présenté certains éléments de preuve tendant à démontrer qu’elle a tenté de déclarer les sous-produits animaux au premier agent des douanes qu’elle a rencontré, la Commission accepte que, suivant l’arrêt Canada (Procureur général) c. Savoie‑Forgeot, 2014 CAF 26 (Forgeot) de la CAF, il était alors trop tard pour se soustraire à sa responsabilité par suite de cette importation interdite. La personne à laquelle elle a déclaré ses cubes de poulet Maggi de marque Knorr était un contrôleur ou encore l’inspecteur 14747 qui a procédé à l’inspection secondaire des sacs dans lesquels se trouvaient les cubes de poulet Maggi de marque Knorr.

 

[38]         L’état du droit énoncé dans l’arrêt Forgeot est maintenant bien établi : une déclaration, qu’elle soit faite par écrit sur la carte de déclaration E311 du passager ou verbalement à un représentant de l’Agence le plus tôt possible, constitue une étape vitale pour éviter une accusation sous le régime de la Loi sur les SAP ou du Règlement sur les SAP. Lorsque des personnes déclarent des produits et les mettent à la disposition des inspecteurs en vue d’une éventuelle saisie en raison du risque qu’ils peuvent constituer pour la vie humaine, animale ou végétale au Canada, ces personnes ne devraient pas être considérées comme ayant violé l’article 40 du Règlement. Ainsi que la Cour l’a déclaré dans l’arrêt Forgeot : « Même si lors d’une inspection il s’avère qu’elle a en sa possession des sous-produits animaux qui ne rencontrent pas les exceptions prévues à la Partie IV du Règlement, elle n’a pas encore complété le processus d’importation de ces sous-produits au Canada ». En revanche, toutefois, lorsque l’individu omet de déclarer et de présenter les produits en question avant l’inspection secondaire, à moins que d’autres circonstances ne l’exigent, il sera considéré comme ayant contrevenu à l’article 40 du Règlement sur les SAP.

 

[39]         La Commission conclut également que Mme Idahosa n’a pas produit un certificat, un document ou un permis en conformité avec les dispositions applicables de la Partie IV du Règlement sur les SAP relativement aux sous-produits animaux qu’elle transportait le 7 décembre 2013.

 

[40]         Le régime très rigoureux de SAP prévu par la Loi sur les SAP, et établi par le Parlement, protège les systèmes agricoles et alimentaires du Canada contre la contamination et les maladies. Les sanctions prévues à la Loi, comme dans le présent cas, peuvent tout de même avoir des répercussions importantes sur les Canadiens et les Canadiennes, particulièrement quelqu’un comme Mme Idahosa. Il semble que Mme Idahosa demande à la Commission de révoquer la sanction imposée dans cette affaire pour des motifs d’ordre humanitaire, et de faire preuve de clémence avec l’annulation de l’amende de 800 $. Malheureusement, une fois que tous les éléments de la violation alléguée sont prouvés par l’Agence, selon la prépondérance des probabilités, la Commission n’a que le pouvoir de confirmer l’avis de violation et d’ordonner au contrevenant de payer l’amende précisée dans cet avis de violation.

 

[41]         Les inspecteurs de l’Agence sont chargés de protéger les Canadiens et les Canadiennes, la chaîne alimentaire et la production agricole du Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Il ne fait aucun doute que ces tâches doivent être accomplies sérieusement. La Commission est consciente que l’Agence a mis en place sa propre façon de traiter les plaintes des voyageurs visant ses inspecteurs, lorsque les actes des inspecteurs envers les voyageurs deviennent excessifs. La compétence de la Commission pour examiner les avis de violation tire son origine de lois habilitantes. Conformément à ces lois, la Commission n’a pas le mandat, ni la compétence d’annuler ou de rejeter un avis de violation pour des motifs uniquement liés à la conduite des inspecteurs de l’Agence envers un requérant, ni pour des motifs d’ordre humanitaire, médical ou financier.

 

[42]         La Loi sur les SAP crée un régime de responsabilité qui est très peu tolérant puisqu’il ne permet aucune défense de diligence raisonnable ou d’erreur de fait. L’article 18 de la Loi sur les SAP dispose :

 

18. (1) Le contrevenant ne peut invoquer en défense le fait qu’il a pris les mesures nécessaires pour empêcher la violation ou qu’il croyait raisonnablement et en toute honnêteté à l’existence de faits qui, avérés, l’exonéreraient.

 

(2) Les règles et principes de la common law qui font d’une circonstance une justification ou une excuse dans le cadre d’une poursuite pour infraction à une loi agroalimentaire s’appliquent à l’égard d’une violation sauf dans la mesure où ils sont incompatibles avec la présente loi.

 

[43]         Si une disposition prévoyant une sanction administrative pécuniaire a été édictée pour une violation particulière, comme c’est le cas de l’article 40 du Règlement SA, la contrevenante, en l’occurrence Mme Idahosa, ne dispose que de très peu de moyens de défense autres que ceux prévus à la partie IV du Règlement SA. En l’espèce, l’article 18 de la Loi sur les SAP exclut en quelque sorte la possibilité pour le voyageur d’invoquer toute excuse pour justifier ses actions, y compris les prétentions de Mme Idahosa, à savoir : 1) qu’elle était bouleversée ou distraite en raison d’événements personnels; 2) qu’elle ignorait qu’elle devait déclarer les cubes de poulet « Maggi » de marque Knorr, étant donné qu’elle pouvait se procurer les mêmes produits au Canada; 3) qu’elle a été mal conseillée sur la façon de remplir sa carte de déclaration; 4) qu’elle ignorait que les cubes contenant des sous-produits animaux ou qu’elle ne pouvait pas importer ces produits. En fin de compte, c’est au voyageur qu’il appartient de connaître le contenu de ses bagages et de faire en sorte que les exigences relatives à l’importation de tout produit alimentaire et de tout produit afférent soient respectées, essentiellement par une déclaration écrite, sur la carte de déclaration, ou par une déclaration de vive voix faite à l’inspecteur primaire de l’Agence. Puisque le législateur et la Cour d’appel fédérale se sont clairement prononcés sur cette question, la Commission conclut que Mme Idahosa n’a invoqué aucun des moyens de défense autorisés par l’article 18 de la Loi sur les SAP.

 

 

Sanction pécuniaire et radiation du dossier après cinq ans

 

[44]         La Commission conclut que l’Agence a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, chacun des éléments nécessaires pour établir que Mme Idahosa a commis la violation énoncée dans l’avis de violation no YYZ4974-0757 du 7 décembre 2013. Compte tenu de la Loi sur les SAP, du Règlement sur les SAP et de la violation prouvée en l’espèce, la Commission conclut que la sanction de 800 $ est celle qui est prescrite par la loi. La Commission statue donc, par ordonnance, que Mme Idahosa a commis la violation et lui ordonne de payer à l’Agence la sanction pécuniaire de 800 $ dans les trente (30) jours suivant la date de signification de la présente décision.

 

[45]         La Commission tient à informer Mme Idahosa que la violation ne constitue ni une infraction criminelle ni une infraction fédérale, mais plutôt une sanction pécuniaire, et qu’elle peut demander au bout de cinq (5) ans la radiation de cette violation des dossiers du ministre, en vertu du paragraphe 23(1) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, qui est ainsi libellé :

 

23. (1) Sur demande du contrevenant, toute mention relative à une violation est rayée du dossier que le ministre tient à son égard cinq ans après la date soit du paiement de toute créance visée au paragraphe 15(1), soit de la notification d’un procès-verbal comportant un avertissement, à moins que celui-ci estime que ce serait contraire à l’intérêt public ou qu’une autre mention ait été portée au dossier au sujet de l’intéressé par la suite, mais n’ait pas été rayée.

 

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), le 10 octobre 2014.

 

 

 

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Don Buckingham, président

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