Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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RTA no 60361

 

 

 

LOI SUR LES SANCTIONS ADMINISTRATIVES PÉCUNIAIRES

EN MATIÈRE D'AGRICULTURE ET D'AGROALIMENTAIRE

 

 

 

 

DÉCISION

 

 

 

Affaire intéressant une demande de révision des faits relatifs à une violation au paragraphe 141(1) du Règlement sur la santé des animaux, alléguée par l'intimée et à la demande du requérant conformément à l'alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire.

 

 

 

 

Steve Ouellet, requérant

 

 

- et -

 

 

L'Agence canadienne d'inspection des aliments, intimée

 

 

 

 

MEMBRE H. LAMED

 

Décision

 

[1] À la suite d'une audience et après avoir examiné toutes les observations orales et écrites, la Commission statue, par ordonnance, que le requérant n'a pas commis la violation alléguée et ne doit pas payer la sanction pécuniaire.

 

 


MOTIFS

 

 

[2]               Le requérant a demandé la tenue d'une audience aux termes du paragraphe 15(1) du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire.

 

[3]               L'audience a eu lieu à Rivière-du-Loup, Québec, le 9 octobre 2009.

 

[4]               Le requérant s'est représenté lui-même.

 

[5]               L'intimée est représentée par Me Réal Doutre.

 

[6]               Des pages manquantes au Rapport de non conformité de l'inspecteur de l'intimée ont été produites au début de l'audience, avec l'accord du requérant.

 

[7]               L'Avis de violation n0708QC0112 daté du 31 août 2007 allègue que le requérant, à ou aux alentours de 14 h 30, le 26 février 2007, à Le Bic, dans la province du Québec, a commis une violation, à savoir : « Avoir transporté des animaux d'espèces différentes ou de poids ou d'âge sensiblement différent à bord un véhicule à moteur sans les avoir séparés » contrairement au paragraphe 141(1) du Règlement sur la santé des animaux.

 

[8]               Le paragraphe 141(1) du Règlement sur la santé des animaux se lit comme suit :

 

Sous réserve du présent article, il est interdit à quiconque de charger dans un wagon de chemin de fer, un véhicule à moteur, un aéronef ou un navire, ou à un transporteur de transporter, des animaux d'espèces différentes ou de poids ou d'âge sensiblement différents sans les avoir séparés.

 

La preuve

 

[9]               L'intimée fait entendre le témoin M. Jean-Luc Michaud, inspecteur des animaux depuis 26 ans, qui a reçu une formation sur le transport des animaux I et II. C'est M. Michaud qui a émis l'Avis de violation.

 

[9]               M. Michaud témoigne que, le 26 février 2007, il était à l'encan des animaux à Le Bic pour une période de deux heures pour procéder à l'inspection des animaux lors de leur arrivée. Il dit avoir été au quai de déchargement et avoir vu l'arrivée au quai du camion et de la remorque y attachée, appartenant au requérant, M. Ouellet. M. Michaud dit que lorsque le camion et la remorque ont été immobilisés au quai, il a regardé dans le compartiment arrière de la remorque et y a constaté une vache parmi les veaux qui s'y trouvaient.


[10]           M. Michaud a témoigné que normalement les veaux sont chargés dans le compartiment avant d'une remorque et les vaches dans celui en arrière. En réponse à la question de la Commission, si cette répartition fait partie d'une exigence ou directive en vertu du Code de pratiques recommandées pour le soin et la manipulation des animaux de la ferme, il a répondu par la négative. M. Michaud dit aussi avoir constaté que la litière dans le compartiment arrière de la remorque de M. Ouellet avait atteint sa limite d'absorption (Rapport de non conformité de l'inspecteur, Onglet 3, Rapport de l'intimée). La suffisance ou non de la litière ne fait pas objet d'un Avis de violation. Il n'est pas contesté que tous les animaux chargés dans la remorque ont été reçus à l'encan en bonne santé.

 

[11]           M. Ouellet a témoigné que la vache que M. Michaud a vu sortir du compartiment arrière avec les veaux n'avait pas voyagé avec les veaux. Si ceci avait été le cas, selon M. Ouellet « il y aurait eu des décès. » M. Ouellet a dit que la vache en question, plus petite que les autres vaches qu'il transportait au même moment, avait été chargée dans le compartiment au milieu de la remorque, séparée des vaches occupant la partie avant de la remorque par une porte fixe de 16 pieds en hauteur, et également séparée par une barrière mobile de 36 pouces des veaux chargés dans le compartiment arrière. Ce dernier est fermé d'une porte extérieure qui est ouverte lorsque la remorque arrive en reculant au quai de déchargement.

 

[12]           M. Ouellet a témoigné que lors de son arrivée à l'encan la journée en question, il a dû attendre entre 10 et 15 minutes dans la cour avant de pouvoir décharger les bovins au quai de déchargement. En attendant de prendre place au quai, M. Ouellet dit avoir enlevé la barrière mobile séparant la vache et les veaux. Une fois la remorque rendue au quai, lorsque la porte extérieure arrière a été ouverte, tous les animaux dans le compartiment arrière étaient debout, prêts à sortir, et aucun des veaux ne présentait des signes de piétinement ou de contact avec la vache. Cette preuve est non contredite par l'intimée. M. Ouellet dit que la vache avait été avec les veaux entre trois et cinq minutes avant que la porte extérieure ait été ouverte. M. Ouellet rapporte que M. Michaud lui aurait dit que le fumier était liquide, mais n'a jamais soulevé la question de la vache qui sortait en même temps que les veaux.

 

Analyse

 

[13]           La preuve est non contredite à l'effet que les animaux étaient tous debout lorsque la porte extérieure du compartiment arrière s'est ouverte, et qu'il n'y avait aucune indice de piétinement chez les veaux. Ces faits tendent à corroborer le témoignage de M. Ouellet que la vache n'avait pas été chargée avec les veaux et n'a pas voyagé avec eux, puisque si tel avait été le cas, il y aurait eu des blessures ou des décès chez les petits veaux. La Commission retient le témoignage de M. Ouellet à l'effet qu'il a soulevé la barrière entre les compartiments arrière et du milieu lorsqu'il attendait dans la cour pour une place au quai, et que la vache avait été parmi les veaux pour trois à cinq minutes.


[14]           L'intimée prétend que le sens du terme « transport » au paragraphe 141(1) du Règlement sur la santé des animaux s'étend à toutes les étapes du transport, y compris le déchargement. Elle appuie cette prétention en citant la décision Les Fermes G. Godbout c. ACIA (RTA no 60172) (appelé à la Cour d'appel fédérale 2006 CAF 408 mais pas sur ce point) où la Commission dit que le terme « voyage prévu » au paragraphe 138(2) du Règlement sur la santé des animaux se termine avec le déchargement.

 

[15]           La Commission souligne que le paragraphe 141(1) ne contient pas le terme « voyage prévu ». Le paragraphe 141(1) établit l'obligation de charger ou de transporter séparément des animaux d'espèces différentes ou de poids ou d'âges sensiblement différents. Même si elle accepte que le terme « transporter » doit aussi comprendre le déchargement, par analogie avec le sens donné au terme « voyage prévu », la Commission ne peut accepter que « transporter » consiste uniquement du déchargement, ce qui serait le résultat d'accepter la prétention de l'intimée. La Commission n'accepte pas que le fait de soulever la barrière entre les deux compartiments à quelques minutes du déchargement, lorsque le véhicule et la remorque se trouvent à leur destination, avec l'effet qu'une vache reste debout parmi des veaux pour cette très courte période de temps, équivaut au « transport » dans le sens envisagé par le paragraphe 141(1). Cette interprétation serait trop étroite et trop stricte, surtout eu égard à la nature draconienne du régime des sanctions monétaires en vertu de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire, dont fait état le juge Létourneau à l'article 21 de la récente décision Michel Doyon c. Procureur général du Canada 2009 CAF 152.

 

[16]           En conséquence, la Commission conclut que l'intimée n'a pas établi que la vache a été chargée ou transportée avec les veaux et donc n'a pas établi l'élément essentiel de la violation.

 

 

 

Fait à Montréal, le 25 octobre 2009.

 

 

 

 

 

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H. Lamed, membre

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