Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence :         Do c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2017 CRAC 13

 

 

 

 

 

Date : 20170329

Dossiers : CART/CRAC‑1945

 

 

 

 

 

 

 

 

ENTRE :

 

 

 

 

 

 

 

Ngoc Do,

 

 

DEMANDERESSE

‑ et ‑

 

 

 

 

 

Agence des services frontaliers du Canada,

INTIMÉE

 

 

 

 

[Traduction de la version officielle en anglais]

 

DEVANT :

Le président Donald Buckingham

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AVEC :

Ngoc Do, s’est représentée elle‑même; et

 

 

Sherri‑Lynn Foran et Dannah Draper, représentantes de l’intimée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Affaire concernant une demande présentée par la demanderesse, conformément à l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, pour obtenir une révision des faits relativement à la violation de l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux, alléguée par l’intimée.

 Montréal,  Montreal, PQ,

DÉCISION

 

La Commission de révision agricole du Canada STATUE, par ordonnance, que la demande de révision de l’avis de violation no 4971-17-0183, daté du 10 février 2017, présentée par la demanderesse, Ngoc Do, en vertu de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, relativement à une violation par la demanderesse de l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux, alléguée par l’Agence des services frontaliers du Canada, EST INADMISSIBLE et est, conformément à la présente ordonnance, REJETÉE.

 

Sur observations écrites seulement.


APERÇU

 

[1]              Ngoc Do (Mme Do) a demandé à la Commission de révision agricole du Canada (la Commission) de l’entendre sur les faits entourant la délivrance d’une avis de violation assorti d’une sanction de 800 $ par l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence) parce qu’elle aurait omis de présenter aux agents de l’Agence le bœuf séché qu’elle a importé au Canada.

 

[2]              Pour que sa demande soit admissible, Mme Do doit satisfaire au critère d’admissibilité en établissant l’existence d’un fondement valable qui lui permettrait en l’espèce d’obtenir gain de cause devant la Commission.

 

[3]              Pour les motifs qui suivent, je conclus que Mme Do n’a pas satisfait à ce critère d’admissibilité.

 

 

MOTIFS RELATIFS À L’INADMISSIBILITÉ DE LA DEMANDE

 

 

Contexte

 

[4]              L’Agence a remis l’avis de violation no 4971‑17‑0183, daté du 10 février 2017, à Mme Do au motif qu’elle a [traduction] « import[é] un sous‑produit animal, à savoir du bœuf séché, sans satisfaire aux exigences prescrites », un acte qui contrevient à l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux (le Règlement SA). La violation reprochée est qualifiée  de « grave » selon l’article 4 du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (le Règlement sur les SAP), qualification qui commande un avertissement ou une sanction de 800 $.

 

[5]              Le 10 février 2017, l’Agence a signifié en mains propres à Mme Do l’avis de violation avec sanction de 800 $.

 

[6]              Dans un courriel envoyé le 15 février 2017 (la demande de révision), Mme Do a demandé que la Commission l’entende sur les faits reprochés dans l’avis de violation, conformément à la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (la Loi sur les SAP).

 

[7]              Au moyen d’une lettre datée du 17 février 2017, la Commission a demandé à Mme Do de fournir, au plus tard le 6 mars 2017, tous les renseignements nécessaires, comme l’exigent les Règles de la Commission de révision (Commission de révision agricole du Canada) (les Règles de la Commission), afin de l’aider à rendre sa décision sur l’admissibilité de la demande. Une copie des Règles de la Commission était jointe à la lettre.

 

[8]              Le 25 février 2017, Mme Do a fourni, par courriel, un autre motif pour lequel la Commission devrait réviser les faits entourant la violation qu’on lui reproche.

 

[9]              Le 10 mars 2017, la Commission a demandé une deuxième fois à Mme Do de fournir, cette fois au plus tard le 27 mars 2017, davantage de détails sur l’incident du 10 février 2017, qui a entraîné la délivrance de l’avis de violation en question, afin de satisfaire aux exigences de l’alinéa 31d) des Règles de la Commission. La Commission a informé Mme Do que si elle ne fournissait pas ces renseignements, sa demande de révision risquait d’être déclarée inadmissible par la Commission et rejetée par voie d’une ordonnance.

 

[10]         La Commission n’a reçu aucun autre document écrit de la part de Mme Do. De plus, Mme Do n’a jamais déposé sa demande de révision par courrier recommandé, comme l’exige le Règlement sur les SAP et les Règles de la Commission.

 

 

Question en litige

 

[11]         La seule question en litige en l’espèce est la suivante : Mme Do a‑t‑elle satisfait au critère d’admissibilité de la Commission en établissant l’existence d’un fondement valable qui lui permettrait d’obtenir gain de cause en l’espèce?

 

 

Analyse et droit applicable

 

[12]         La demande de révision est un droit accordé par le législateur, qui permet aux demandeurs de faire réviser les avis de violation par un organisme indépendant, à peu de frais et sans avoir à y consacrer beaucoup de temps. Toutefois, l’ensemble du processus, y compris le dépôt des actes de procédure, l’audience et la rédaction de la décision, exigera tout de même de toutes les parties un investissement substantiel en temps et en argent. C’est la raison pour laquelle le législateur impose aux demandeurs des exigences de base à respecter afin de préserver leurs droits. Lorsque le demandeur ne respecte pas les exigences de la Loi sur les SAP, du Règlement sur les SAP et des Règles de la Commission, celle-ci peut décider que la demande de révision du demandeur est inadmissible.

 

[13]         La demande est inadmissible si le demandeur : 1) a déjà payé la sanction infligée dans l’avis de violation; 2) a omis de déposer la demande de révision selon les modalités et dans les délais prescrits; 3) a omis de fournir un motif valable pour que la Commission révise la décision de l’Agence.

 

[14]         Sont considérés comme des motifs valables tout renseignement fourni par le demandeur qui démontrerait que la violation reprochée n’a pas eu lieu, que la personne désignée dans l’avis de violation n’est pas celle qui a commis la violation ou, dans des circonstances plus rares, que l’Agence ou le demandeur se sont conduits de façon telle qu’on ne peut prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les éléments de la violation ont eu lieu.

 

[15]         Les moyens de défense inadmissibles comprennent ceux qui sont expressément exclus par la Loi sur les SAP, à savoir que le demandeur a essayé de ne pas commettre la violation (la diligence raisonnable), ou que le demandeur s’est trompé au sujet des faits qui ont mené à la perpétration de la violation (l’erreur de fait).

 

[16]         En l’espèce, la Commission a reçu certaines explications de la part de Mme Do sur les raisons pour lesquelles elle estime qu’elle a à bon droit omis de présenter et de déclarer aux agents de l’Agence le bœuf séché qu’elle a importé au Canada.

 

[17]         Mme Do a fourni à la Commission les motifs suivants à l’appui de sa demande de révision :

 

a)                 Elle ne savait pas qu’importer un sous‑produit animal au Canada était interdit;

 

b)                 Comme elle ne se sentait pas bien lorsqu’elle se préparait pour son retour au Canada, sa mère l’a aidé à faire ses valises. Par conséquent, lorsque l’agent de l’Agence lui a demandé si elle apportait des produits de viande au Canada, elle a répondu avec [traduction] « incertitude » parce qu’elle n’était pas certaine si sa mère avait ajouté des articles dans sa valise et, en fait, sa mère avait mis du bœuf séché dans ses bagages;

 

c)                  Si elle avait su que les produits de viande étaient interdits, elle ne les aurait jamais apportés au Canada et elle promet qu’elle ne le refera plus;

 

d)                 Après avoir dit à l’agent de l’Agence qu’elle ne savait pas que la viande était interdite, ce dernier était très impoli avec elle;

 

e)                 Elle a demandé que le montant de la sanction soit réduit.

 

[18]         Aucun des motifs invoqués ne révèle un fondement qui permettrait à Mme Do d’obtenir gain de cause dans la demande qu’elle a présentée à la Commission pour que cette dernière conclue qu’elle n’a pas commis la violation reprochée.

 

[19]         Les motifs a), b), et c) invoqués par Mme Do sont inadmissibles en application de l’article 18 de la Loi sur les SAP (et du paragraphe 11 de l’arrêt Doyon c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 152, de la Cour d’appel fédérale), qui exclut les moyens de défense fondés sur l’erreur de fait (c’est‑à‑dire que la demanderesse a commis une erreur portant sur les faits qui ont conduit à la perpétration de la violation) et la diligence raisonnable (c’est‑à‑dire que la demanderesse a fait de son mieux pour empêcher la violation).

 

[20]         Essentiellement, Mme Do a soulevé que comme elle ne savait pas que la viande se trouvait dans ses bagages, elle ne pouvait pas le déclarer avant que les agents de l’Agence ne la trouvent. Le fait de prétendre ignorer le contenu de ses bagages pour justifier l’importation d’aliments non déclarés a été jugé par la Cour d’appel fédérale comme un motif inadmissible pour invalider une avis de violation (voir le paragraphe 24 de l’arrêt Agence des services frontaliers du Canada c. Castillo, 2013 CAF 271). La violation en question en est une qui entraîne une responsabilité absolue.

 

[21]         Le motif d) soulevé par Mme Do n’a aucune incidence importante sur la violation qui a été commise le 10 février 2017. Les agents de l’Agence sont chargés de protéger les Canadiens, la chaîne alimentaire et la production agricole au Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Il ne fait aucun doute que ces fonctions doivent être exécutées de façon responsable. La Commission sait que l’Agence dispose de sa propre procédure pour la révision des plaintes déposées par les Canadiens à l’encontre des actions ou de ceux de ses agents, comme l’énonce le site Web de l’Agence, sur sa page intitulée « Contactez‑nous : Compliments, commentaires et plaintes ».

 

[22]         Enfin, le motif e) invoqué par Mme Do concerne la capacité et le pouvoir discrétionnaire de l’Agence de donner un avertissement, une sanction ou une sanction réduite. En ce qui concerne le choix entre un avertissement ou une sanction, à moins que le pouvoir discrétionnaire soit exercé de mauvaise foi ou à des fins illicites, une cour de révision n’a pas le loisir de modifier le choix de l’Agence. Rien ne démontre en l’espèce que la décision d’infliger à Mme Do une sanction plutôt qu’un avertissement était fondée sur de la mauvaise foi ou rendue à des fins illicites. Si le contrevenant paie la sanction dans un délai de 15 jours, il ne devra payer que 50 % de la sanction infligée. Après ce délai, toutefois, il devra payer la totalité de la sanction.

 

[23]         Par ailleurs, en ce qui concerne la demande de Mme Do visant à obtenir une réduction de la sanction, il est clair que le système de sanctions administratives pécuniaires très strict établi par le législateur en vertu de la Loi sur les SAP et du Règlement sur les SAP peut avoir des conséquences sévères pour les Canadiens. Malheureusement, la Commission ne peut annuler ou modifier la sanction infligée sur le fondement de motifs circonstanciels, humanitaires ou financiers. Le pouvoir de la Commission d’accorder réparation découle de sa loi habilitante. Selon cette loi, la Commission n’a pas le mandat d’annuler ou de rejeter une avis de violation ou une décision du ministre sur le fondement de motifs circonstanciels, humanitaires ou financiers, et n’est pas non plus habilitée à le faire.

 

[24]         Par conséquent, au vu du dossier dont je dispose, je conclus que Mme Do n’a pas satisfait au critère d’admissibilité de la Commission d’établir l’existence d’un fondement valable qui lui permettrait d’obtenir gain de cause devant la Commission en l’espèce.

 

 

Dispositif

 

[25]         Par conséquent, la Commission statue, par ordonnance, que la demande de révision de l’avis de violation no 4971‑17‑0183, présentée par Mme Do, est inadmissible. De plus, en application du paragraphe 9(3) de la Loi sur les SAP, Mme Do est réputée avoir commis la violation indiquée dans l’avis de violation avec sanction, de sorte que la sanction de 800 $ est payable à l’Agence.

 

[26]         Mme Do voudra peut‑être communiquer avec les représentants de l’Agence pour savoir s’ils accepteraient de s’entendre sur un échéancier des paiements pour la sanction infligée.

 

[27]         La violation en cause ne constitue pas une infraction criminelle. Après cinq ans, Mme Do pourra demander au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire que cette violation soit rayée de son dossier, conformément à l’article 23 de la Loi sur les SAP.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), le 29e jour du mois de mars 2017.

 

 

 

 

 

 

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Donald Buckingham, président

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