Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Référence :         Gavryushenko c. Canada  (Agence des services frontaliers du Canada),  2016  CRAC  33

 

 

 

 

Date :  20161214

Dossier :  CART/CRAC‑1884

ENTRE :

 

 

 

 

 

 

 

Marina Gavryushenko,

demanderesse

 

‑ et –

 

 

 

 

 

Agence des services frontaliers du Canada,

intimée

 

[Traduction de la version officielle en anglais]

 

DEVANT :

Le président Donald Buckingham

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AVEC :

Sofia Hrapunsky, représentant la demanderesse; et

 

 

Pierre Dastous, représentant l’intimée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Affaire intéressant une demande de révision des faits présentée par la demanderesse, en application de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, relativement à une violation, alléguée par l’intimée, du paragraphe 16(1) de la Loi sur la santé des animaux.

 

 

 

 

 

DÉCISION

 

 

 

 

À la suite d’une audience et après avoir examiné l’ensemble des observations orales et écrites des parties, la Commission de révision agricole du Canada statue par ordonnance que, selon la prépondérance des probabilités, la demanderesse, Marina Gavryushenko, a commis la violation décrite dans l’avis de violation no 4974‑16‑0114, daté du 9 février 2016, concernant les faits qui se sont produits ce jour, et qu’elle est tenue de payer à l’intimée la sanction pécuniaire de 1 300 $ dans les trente (30) jours suivant la date de notification de la présente décision.

 

 

 

Audience tenue à Toronto, ON,

le lundi 28 novembre 2016.

 Montréal  Montreal, PQ,


APERÇU

 

[1]              La présente affaire porte sur une grosse pièce de salami de bœuf importée au Canada le 9 février 2016.

 

[2]              La demanderesse, Marina Gavryushenko (Mme Gavryushenko), n’a pas déclaré ou présenté le salami de bœuf qui était dans ses bagages au moment de l’importation. L’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence) lui a donc remis un avis de violation assorti d’une sanction de 1 300 $ pour avoir omis de présenter le salami aux agents des services frontaliers, en contravention du paragraphe 16(1) de la Loi sur la santé des animaux (Loi sur la SA).

 

[3]              Mme Gavryushenko a demandé à la Commission de révision agricole du Canada (la Commission) de l’entendre sur les faits reprochés dans l’avis de violation.

 

[4]              Dans l’examen des faits de la présente affaire, il m’incombe de soupeser la preuve qui m’est présentée et de déterminer si l’Agence a prouvé les éléments qui constituent le fondement de l’avis de violation. S’agissant d’une violation du paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA, l’Agence doit prouver que Mme Gavryushenko est la personne qui a commis la violation, et qu’alors qu’elle importait du salami de bœuf au Canada, elle a omis de le présenter aux agents des services frontaliers.

 

[5]              Si l’Agence s’acquitte du fardeau de preuve qui lui incombe, la demanderesse sera tenue responsable d’une violation sous le régime des SAP, à moins qu’elle puisse établir un moyen de défense, une justification ou une excuse prévu par la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Loi sur les SAP), le Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Règlement sur les SAP) ou, comme en l’occurrence, la Loi sur la SA.

 

[6]              Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’Agence a prouvé les éléments qui constituent le fondement de l’avis de violation, que Mme Gavryushenko n’a soulevé aucun moyen de défense, excuse ou justification valable relativement à ses actes, et que la sanction établie en l’espèce est valide selon la Loi sur les SAP et le Règlement sur les SAP.

 

 

MOTIFS

 

Contexte

 

[7]              Mme Gavryushenko est entrée au Canada le 9 février 2016, en provenance de Russie, pour visiter sa fille, Sofia Hrapunsky (Mme Hrapunsky) et la famille de celle‑ci.

 

[8]              Après avoir inspecté ses bagages dans la zone secondaire des douanes de l’aéroport international Pearson de Toronto, l’Agence a dressé et notifié à Mme Gavryushenko l’avis de violation no 4974‑16‑0114, car celle‑ci aurait [traduction] : « omis de présenter un animal ou une chose, à savoir 1 salami de bœuf », ce qui, selon l’Agence, contrevient au paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA. La violation alléguée est qualifiée de « très grave » selon l’article 4 et l’annexe 1 du Règlement sur la SAP, et la sanction prévue est un avertissement ou une amende de 1 300 $.

 

[9]              Dans une lettre en date du 16 février 2016 (envoyée par messager, le 18 février 2016), Mme Gavryushenko, sous la plume de Mme Hrapunsky, a demandé à la Commission de l’entendre sur les faits reprochés dans l’avis de violation (demande de révision). Elle exposait dans sa demande les motifs de sa contestation. Pour conserver ses droits de présenter une demande de contestation en vertu de la Loi sur les SAP, Mme Gavryushenko n’a pas acquitté la sanction qui lui a été infligée.

 

[10]         La Commission a fixé l’audition de la présente affaire au 28 novembre 2016, à Toronto (Ontario). Pierre Dastous a comparu pour le compte de l’Agence. Mme Gavryushenko n’a pas comparu en personne, mais était plutôt représentée par sa représentante dûment autorisée, Mme Hrapunsky.

 

 

Questions en litige

 

[11]         Trois questions se posent en l’espèce :

 

                     i.            l’Agence a-t-elle prouvé chacun des éléments de la violation du paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA?

 

                   ii.            Mme Gavryushenko a-t-elle établi un moyen de défense qui, selon l’article 18 de la Loi sur les SAP, pourrait justifier ou excuser son geste du 9 février 2016?

 

                 iii.            la sanction de 1 300 $ est‑elle justifiée en droit?

 

 

Analyse

 

Question no 1 – L’Agence a‑t‑elle prouvé tous les éléments nécessaires de la violation du paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA?

 

[12]         Certaines affaires de violation découlant de divers lois et règlements visés par la Loi sur les SAP et le Règlement sur les SAP ont fait l’objet d’un examen détaillé par les tribunaux, étant donné, tout particulièrement, que ces violations sont de responsabilité absolue (Doyon c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 152 (Doyon), aux paragraphes 11 et 27).

 

[13]         De plus, la Cour d’appel fédérale a établi que les organismes d’exécution ont le fardeau de prouver chacun des éléments constitutifs d’une violation de la Loi sur les SAP et du Règlement sur les SAP pour qu’il puisse être conclu à une violation par le contrevenant à qui elle est reprochée. (Doyon, au paragraphe 42).

 

[14]         Pour déterminer les éléments constitutifs d’une violation donnée, la Commission doit appliquer la méthode proposée dans l’arrêt Doyon, qui consiste à analyser les éléments requis selon le libellé de la disposition qui crée la violation (Doyon, au paragraphe 41).

 

[15]         Le paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA est rédigé comme suit :

 

16 (1)  La personne qui importe des animaux, des produits ou sous-produits de ceux‑ci, des aliments pour animaux ou des produits biologiques vétérinaires, ainsi que toute autre chose soit se rapportant aux animaux, soit contaminée par une maladie ou une substance toxique, les présente, au plus tard à l’importation, à un inspecteur, à un agent d’exécution ou à un agent des douanes qui peut les examiner lui-même ou les retenir jusqu’à ce que l’inspecteur ou l’agent d’exécution s’en charge.

 

[16]         Pour que l’Agence puisse en l’espèce établir qu’il y a eu violation du paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA justifiant l’imposition d’une SAP, elle doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, les trois éléments essentiels suivants :

 

                    Élément no 1 ‑ Mme Gavryushenko est la personne qui a commis la violation;

 

                    Élément no 2 ‑ Mme Gavryushenko a importé un produit animal ou un sous‑produit animal au Canada;

 

                    Élément no 3 ‑ Mme Gavryushenko a omis de présenter le sous‑produit animal aux agents des services frontaliers avant d’être dirigée vers la zone secondaire des douanes pour une inspection des bagages.

 

Conclusions relatives aux éléments nos 1 et 2

 

[17]         Élément no 1—L’identité de Mme Gavryushenko, à titre d’auteure présumée de la violation—n’est pas en litige. Mme Gavryushenko est la contrevenante présumée qui a été identifiée par l’agent des services frontaliers no 35150 à la zone secondaire des douanes, et les documents de voyage qu’elle a présentés à l’agent le confirment. Par ailleurs, l’agent no 35150 a indiqué que les sacs inspectés appartenaient à Mme Gavryushenko.

 

[18]         Quant à l’élément no 2, la preuve fournie par l’agent no 35150 est qu’il a procédé à une fouille des bagages de Mme Gavryushenko et qu’il y a découvert un gros salami de bœuf. Il a déclaré que Mme Gavryushenko avait indiqué dans la carte de déclaration douanière E311 de l’Agence (carte de déclaration) qu’elle n’importait aucun aliment ni produit agricole. Lorsqu’il a découvert le salami de bœuf, l’agent no 35150 a demandé à Mme Gavryushenko pourquoi elle ne l’avait pas déclaré et celle‑ci a répondu n’avoir aucune raison.

 

[19]         Dans sa demande de révision, Mme Gavryushenko ne nie pas avoir importé le salami de bœuf. En fait, Mme Hrapunsky explique dans la demande que sa mère [traduction] : « [...] n’était pas à l’aise de se présenter les ‘mains vides’ pour nous visiter. C’est pourquoi, à l’aéroport, elle a pris dans un magasin un salami qui, selon elle, avait une certaine valeur sentimentale. Dans mon enfance, le salami était considéré comme une gâterie, un plaisir rare et délicieux”. Ainsi, en ce qui concerne l’élément 2, j’estime que, selon la prépondérance des probabilités, le 9 février 2016, Mme Gavryushenko a importé un produit ou un sous‑produit animal au Canada.

 

Conclusion relative à l’élément 3

 

[20]         Les voyageurs ont la possibilité de déclarer et de présenter les marchandises importées autant par écrit dans la carte de déclaration qu’ils remplissent avant d’entrer au Canada que verbalement à l’agent principal de l’Agence durant le processus initial de contrôle des douanes à leur arrivée au Canada. L’obligation de déclarer et de présenter un sous‑produit animal est prescrite par l’article 16 de la Loi sur la SA et l’article 12 de la Loi sur les douanes.

 

[21]         Dans l’arrêt Canada c. Savoie-Forgeot, 2014 CAF 26, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les marchandises devaient être disponibles en vue d’une inspection, c’est‑à‑dire que la démarche visant à les déclarer ou à les présenter devait être effectuée au premier contact avec les agents des services frontaliers (paragraphe 25). La déclaration des marchandises à la zone de contrôle primaire des douanes est en général le point final du processus d’importation (Savoie-Forgeot, aux paragraphes 19 et 25), le moment où le point d’irrévocabilité est atteint. L’omission de déclarer ou de présenter un sous‑produit animal à ce stade est ce qui sous‑tend l’imposition d’une sanction administrative pécuniaire par l’Agence.

 

[22]         Il ressort sans contredit de la preuve que Mme Gavryushenko a omis de déclarer et de présenter le salami de bœuf qu’elle importait, que ce soit par écrit dans sa carte de déclaration ou verbalement à l’agent des services frontaliers à la zone de contrôle primaire. Par conséquent, en ce qui concerne l’élément 3, je conclus que l’Agence a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que Mme Gavryushenko a omis de présenter le salami de bœuf aux agents des services frontaliers avant d’atteindre le point d’irrévocabilité du processus d’importation.

 

[23]         Mme Gavryushenko fait valoir, dans sa demande de révision, que l’anglais lui avait posé une difficulté importante et qu’elle avait eu beaucoup de mal à communiquer avec les agents des services frontaliers, ce qui a nui sa capacité de déclarer le salami avant que le point d’irrévocabilité du processus d’importation soit atteint. Peut-être est‑il possible d’imaginer certaines circonstances rares où l’incapacité d’un demandeur à lire, à écrire ou à comprendre les deux langues officielles du Canada pourrait l’empêcher de faire la déclaration écrite ou verbale d’importation de marchandises qui est exigée de sorte qu’il pourrait ne pas atteindre le point d’irrévocabilité du processus d’importation. Cependant, les faits de la présente affaire ne révèlent pas l’existence de telles circonstances.

 

[24]         Mme Hrapunsky a soutenu, autant dans la demande de révision qu’à l’audience, que sa mère parlait, comprenait et lisait très peu l’anglais. Dans la demande, elle écrit que sa mère [traduction]« … parle très peu l’anglais et qu’elle est encore moins capable de le lire. Elle n’a pas bien compris comment remplir le formulaire de déclaration de douanes et prévoyait demander l’aide d’un agent des douanes. Elle est toutefois devenue anxieuse lorsqu’un agent s’est approché d’elle avec un chien et elle a complètement perdu sa capacité à communiquer ».

 

[25]         Mme Hrapunsky a déclaré que, de façon générale, sa mère ne parle pas l’anglais, sinon très peu. Quant à l’incident à l’origine de l’avis de violation, Mme Hrapunsky a déclaré que sa mère avait été escortée par deux agents des services frontaliers qui l’ont menée de la zone secondaire des douanes à la zone d’attente des arrivées où elle a pu la rencontrer. Ils sont ensuite retournés tous les quatre dans la zone secondaire des douanes afin de compléter le processus relatif aux SAP. Mme Hrapunsky a déclaré qu’une fois dans la zone secondaire des douanes, elle a demandé à sa mère si on lui avait offert les services d’un interprète et que sa mère lui avait répondu par la négative. Lors du contre‑interrogatoire, Mme Hrapunsky a mentionné qu’elle avait posé la question à sa mère en russe, mais qu’aucune d’elles n’avait demandé l’aide d’un interprète pendant qu’elles attendaient que le processus relatif aux SAP prenne fin.

 

[26]         La preuve présentée par l’Agence quant au fait que Mme Gavryushenko avait une connaissance moins limitée de la langue anglaise est convaincante. L’agent de l’ASFC no 35150, dans le rapport narratif (onglet 3 du rapport de l’Agence) qu’il a rédigé le jour même de la violation présumée, a écrit [traduction]: « Il n’y a eu aucun problème de langue durant l’entrevue, puisque chacun de nous, la voyageuse et moi-même, comprenait ce que l’autre disait ». L’agent no 35150 a également souligné que, d’après son expérience, il ressortait de la façon dont Mme Gavryushenko avait rempli sa carte de déclaration qu’elle comprenait l’anglais, c.‑à‑d. qu’elle l’a remplie en entier et correctement, sans aucune des erreurs que les personnes ayant une connaissance insuffisante de l’anglais ou du français font habituellement. L’agent no 35150 a également déclaré que Mme Gavryushenko avait pu répondre à toutes les questions qu’il lui avait posées en anglais durant l’inspection secondaire et qu’elle n’avait jamais demandé, au cours de cette inspection, les services d’un interprète.

 

[27]         Mme Gavryushenko a choisi de ne pas témoigner en l’espèce de sorte qu’il m’a été impossible d’évaluer ses compétences linguistiques en personne. Qui plus est, la preuve indique clairement que Mme Gavryushenko n’a jamais demandé l’aide d’un interprète et qu’aucun agent des services frontaliers n’a indiqué qu’il avait des raisons de croire à l’existence d’une importante barrière linguistique entre lui et Mme Gavryushenko. De même, selon l’analyse faite dans Mohammadian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 191, [2001] 4 C.F. 85, l’on ne saurait, pour des raisons de principe légitimes, donner suite à des affirmations tardives en matière de compréhension linguistique.

 

[28]         Compte tenu de la preuve présentée, il est impossible de conclure que les limites linguistiques invoquées par Mme Gavryushenko ont empêché celle‑ci de déclarer le salami de bœuf. Autrement dit, je suis convaincu que ses compétences linguistiques en anglais ne l’ont pas empêchée de déclarer le salami de bœuf avant d’atteindre le point d’irrévocabilité du processus d’importation.

 

[29]         Ainsi, en ce qui concerne l’élément no 3, j’estime que, selon la prépondérance des probabilités, le 9 février 2016, Mme Gavryushenko a omis de présenter un sous‑produit animal aux agents des services frontaliers avant d’être renvoyée pour inspection des bagages à la zone secondaire des douanes.

 

[30]         Par conséquent, je conclus que l’Agence a prouvé les trois éléments de la violation.

 

 

Question no 2 – Mme Gavryushenko a-t-elle établi un moyen de défense qui, selon l’article 18 de la Loi sur les SAP, pourrait justifier ou excuser son geste du 9 février 2016?

 

[31]         Il appert de la Loi sur les SAP que quiconque contrevient au paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA peut se défendre en présentant des éléments de preuve tendant à démontrer, selon la prépondérance des probabilités, l’existence de circonstances justifiant ou excusant son geste conformément à l’article 18 de la Loi sur le SAP.

 

[32]         Lorsqu’une disposition prévoyant une sanction administrative pécuniaire a été édictée à l’égard d’une violation particulière, l’article 18 de la Loi sur les SAP n’offre au contrevenant, en l’occurrence Mme Gavryushenko, que peu de moyens de défense. Les moyens de défense, excuses et justifications que Mme Gavryushenko soulève sont les suivants :(1) elle pouvait à peine comprendre et parler l’une ou l’autre des langues officielles du Canada; (2) elle croyait qu’elle pouvait apporter du salami de bœuf au Canada parce qu’elle pouvait en apporter dans d’autres pays; (3) elle croyait qu’il s’agissait d’un produit modifié et transformé et qu’elle pouvait donc l’importer au Canada; (4) elle voulait apporter une gâterie spéciale à sa famille; (5) elle se trouve dans une situation financière difficile; et (6) ce genre de chose ne lui est jamais arrivé avant et ne lui arrivera plus jamais à l’avenir.

 

[33]         Chacun de ces moyens de défense, excuses et justifications est soit expressément exclu par l’article 18 de la Loi sur les SAP (les défenses d’erreur de fait ou de diligence raisonnable ne peuvent être invoquées), soit dénué de pertinence dans le cas actuel où l’on a omis de présenter un sous‑produit animal aux agents des services frontaliers au moment de son importation.

 

[34]         Des problèmes linguistiques importants pourraient, dans de rares circonstances (non présentes en l’espèce), être considérés comme un obstacle à la commission de l’acte reproché (comme nous l’avons vu dans la section précédente), plutôt que comme un moyen de défense au sens propre du terme. Les erreurs concernant les produits qu’une personne peut importer au Canada ne sont pas des moyens de défense admissibles en vertu de l’article 18 de la Loi sur les SAP. Enfin, les raisons justifiant l’importation d’un produit, la situation financière de l’importateur et ses déclarations concernant son comportement passé et futur ne sont pas des éléments pertinents en l’espèce, alors qu’on a omis de présenter un produit animal aux agents des services frontaliers au moment de son importation.

 

[35]         Les agents des services frontaliers doivent protéger les Canadiens, la chaîne alimentaire et la production agricole du Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Il ne fait aucun doute que les agents doivent exercer ces fonctions de façon diligente, respectueuse et responsable. Les voyageurs qui estiment avoir été lésés par l’Agence peuvent faire part de leurs préoccupations par l’entremise de la rubrique « Compliments, commentaires et plaintes » du site Web de l’Agence.

 

 

Question no 3 – La sanction de 1 300 $ est‑elle justifiée en droit?

 

[36]         La seule question qu’il me reste à trancher est celle de savoir si la sanction de 1 300 $ est justifiée en vertu de la Loi sur les SAP et du Règlement sur les SAP. J’estime que ce montant est justifié en vertu de la Loi sur les SAP et du Règlement sur les SAP pour les motifs suivants.

 

[37]         Pour établir la sanction appropriée, il faut d’abord déterminer si la violation est mineure, grave ou très grave au sens de l’annexe 1 du Règlement sur les SAP. Une violation du paragraphe 16(1) de la Loi sur la SA relève de la catégorie des « violations très graves » en vertu du Règlement sur les SAP. À la date où la violation a été commise, l’article 5 du Règlement fixait à 1 300$ la sanction applicable dans le cas d’une violation très grave commise par une personne physique, sauf dans le cadre d’une entreprise ou à des fins lucratives. C’est le cas de Mme Gavryushenko.

 

[38]         Le régime très rigoureux de SAP prévu par la Loi et établi par le Parlement et les sanctions qui en découlent peuvent néanmoins avoir d’importantes répercussions pour quelqu’un comme Mme Gavryushenko. Mme Gavryushenko a indiqué à la Commission qu’elle se trouvait dans une situation financière difficile et elle lui a demandé d’annuler, pour des motifs d’ordre financier ou humanitaire, la sanction imposée en l’espèce. Malheureusement, dès lors que l’Agence a établi, selon la prépondérance des probabilités, tous les éléments de la violation alléguée, la Commission n’a que le pouvoir de confirmer l’avis de violation et d’ordonner au contrevenant de payer l’amende précisée dans l’avis de violation. Selon ces lois, la Commission n’a pas le mandat ni la compétence d’annuler ou de rejeter un avis de violation pour des motifs d’ordre humanitaire, médical ou financier.

 

 

Dispositif

 

[39]         Je conclus que :

 

                     i.            l’Agence a prouvé chacun des éléments nécessaires pour établir que Mme Gavryushenko a commis la violation énoncée dans l’avis de violation no 4974‑16‑0114, daté du 9 février 2016;

 

                   ii.            Mme Gavryushenko n’a pas invoqué de moyen de défense, justification ou excuse valable pour ne pas avoir présenté aux agents des services frontaliers le salami de bœuf qu’elle a importé au Canada à la même date;

 

                 iii.            la sanction de 1 300$ est justifiée, s’agissant de la somme à verser en vertu de la Loi sur les SAP et du Règlement sur les SAP.

 

[40]         Par conséquent, il est par la présente ordonné que Mme Gavryushenko verse à l’Agence la somme de 1 300 $ dans les trente (30) jours suivant la date de notification de la présente décision.

 

[41]         Mme Gavryushenko peut communiquer directement avec les représentants de l’Agence pour s’enquérir de la possibilité de convenir d’un calendrier des versements acceptable pour le paiement de la sanction.

 

[42]         La violation en cause n’est pas une infraction criminelle. Dans cinq ans, Mme Gavryushenko pourra demander au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire que la mention de cette violation soit rayée de son dossier, conformément à l’article 23 de la Loi sur les SAP.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), ce 14jour de décembre 2016.

 

 

 

 

 

 

____________________________________________

Donald Buckingham, président

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.