Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence :     Pelletier c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile),                           2015 CRAC 26

 

Date :  20151207

Dossier :  CART/CRAC‑1869

ENTRE :

 

Martin Pelletier, demandeur

 

 

‑ et ‑

 

 

Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, intimé

 

 

 

DEVANT :                   Le président Donald Buckingham

 

 

AVEC :                           Martin Pelletier, s’est représenté lui‑même

Melanie A. Charbonnneau, représentante pour l’intimé

 

 

 

Dans l’affaire de la demande présentée par le demandeur, en vertu de l’article 13 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire afin que la Commission révise la décision CS‑75790 par laquelle le ministre a conclu, le 28 septembre 2015, que le demandeur a enfreint l’article 34 du Règlement sur la santé des animaux.

 

 

 

DÉCISION

 

La Commission de révision agricole du Canada STATUE que la demande de révision de la décision CS‑75790 datée du 28 septembre 2015 du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, présentée par le demandeur en vertu de  l’article 13 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, EST IRRECEVABLE, et, conformément à la présente ordonnance, REJETÉE.

 

 

Sur observations écrites seulement.


APERÇU

 

[1]              Martin Pelletier (M. Pelletier) a demandé à la Commission de révision agricole du Canada (Commission) de réviser et d’annuler la décision CS‑75790 du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (décision du ministre). Le ministre conclut dans sa décision que M. Pelletier a importé deux sachets contenant des produits laitiers du Perou, sans respecter les exigences prévues par la loi pour ce type d’importation et qu’en conséquence, l’Agence des services frontaliers du Canada (Agence) avait, à juste titre, délivré à M. Pelletier un avis de violation assorti d’une sanction de 800 $.

 

[2]              Pour que sa demande soit recevable, M. Pelletier doit répondre aux critères énoncés dans la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Loi SAP), le Règlement sur sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Règlement SAP) et les Règles de la Commission de révision (Commission de révision agricole du Canada) (Règles de la Commission).

 

[3]              La seule question à trancher en l’espèce consiste à déterminer si M. Pelletier a respecté ces critères.

 

 

MOTIFS DE L’IRRECEVABILITÉ DE LA DEMANDE

 

Contexte

 

[4]              L’Agence a délivré l’avis de violation 3125-15-0073 à M. Pelletier, à qui il est reproché d’avoir importé des produits laitiers au Canada, sans se conformer aux exigences prévues par la loi pour ce type d’importation.

 

[5]              M. Pelletier a contesté l’avis de violation et a demandé au ministre d’examiner les faits allégués dans l’avis de violation.

 

[6]              Le ministre a rendu sa décision le 28 septembre 2015, a confirmé la délivrance de l’avis de violation par l’Agence et a communiqué sa décision à M. Pelletier.

 

[7]              Le 9 octobre 2015, la Commission a reçu une lettre de la part de M. Pelletier par courrier ordinaire, demandant que la Commission révise la décision du ministre.

 

[8]              Dans des courriels datés des 20 et 21 octobre 2015 et du 20 novembre 2015, M. Pelletier a fait parvenir des renseignements additionnels à la Commission. M. Pelletier a aussi fait parvenir des informations additionnelles à la Commission par lettre recommandée datée du 13 novembre 2015.

 

[9]              Dans son courriel daté du 26 octobre 2015, l’Agence a déposé à la Commission la preuve que la décision du ministre avait été notifiée à M. Pelletier le 2 octobre 2015 et elle a confirmé que la sanction de 800 $, payable par M. Pelletier selon l’avis de violation, n’avait pas été payée.

 

 

Question en litige

 

[10]         La seule question à trancher en l’espèce consiste à déterminer si M. Pelletier a répondu aux critères prévus pas la loi pour permettre à la Commission de se prononcer sur sa demande de révision.

 

 

Analyse

 

[11]         En vertu de la Loi SAP, du Règlement SAP et des Règles de la Commission, la Commission est tenue de rendre une décision sur la recevabilité de la demande de révision présentée par le demandeur avant de procéder à une audience complète de l’affaire.

 

[12]         Les motifs suivants constituent des obstacles à la recevabilité de la demande lorsque le demandeur : (1) a déjà payé la sanction jointe à l’avis de violation; (2) a omis de présenter une demande de révision dans le délai et selon les modalités réglementaires; ou (3) a omis de fournir une raison ou des motifs valables rendant possible la révision en sa faveur d’une décision du ministre. En l’espèce, la demande de révision présentée par M. Pelletier est visée par le deuxième motif.

 

[13]         L’alinéa 13a) et le paragraphe 14(1) du Règlement SAP énoncent les délais de rigueur prévus par la loi et les modes de notification autorisés en ce qui a trait à la présentation d’une demande de révision d’une décision du ministre par la Commission :

 

13. Lorsque le ministre est saisi d’une contestation au titre des paragraphes 8(1) ou 9(2) de la Loi et qu’il notifie la personne en cause qu’il a déterminé qu’elle a commis la violation, celle-ci peut :

 

a) demander par écrit à la Commission de l’entendre sur les faits reprochés  dans les 15 jours suivant la date de notification;

 

[…]

 

14. (1) Une personne peut présenter une demande prévue aux articles 11, 12 ou 13 en la livrant en mains propres ou en l’envoyant par courrier recommandé ou par messagerie, ou par télécopieur ou autre moyen électronique, à une personne et à un lieu autorisés par le ministre.

 

[14]         La Cour d’appel fédérale (CAF) a donné à ces dispositions une interprétation très stricte. En premier lieu, elle a conclu de façon non équivoque que le courrier ordinaire n’est pas un mode de transmission autorisé pour la présentation d’une demande de révision visant à être entendu par la Commission (voir Renvoi relatif à l’article 14 du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, 2012 CAF 130 (Renvoi relatif à l’article 14), aux paragraphes 22 à 25).

 

[15]         Dans un deuxième temps, la Commission n’a pas le pouvoir d’étendre les délais fixés par la Loi et le Règlement SAP pour présenter une demande de révision (voir Clare c. Canada (Procureur général), 2013 CAF 265 (Clare)). La CAF a affirmé, dans cet arrêt, que « [...] [l]a Commission a donc statué à juste titre qu’elle n’avait pas le pouvoir de dispenser quiconque des effets de l’application stricte des dispositions de la Loi et du règlement SAPMAA. » (au paragraphe 24).

 

[16]         C’est exactement la situation dans laquelle se trouve M. Pelletier pour ce qui est du dépôt de sa demande de révision qu’il a adressée à la Commission en vue de réviser la décision du ministre. Le délai fixé par la loi pour la transmission par M. Pelletier d’une demande de révision par un moyen autorisé était de 15 jours après la date de notification de la décision du ministre. M. Pelletier en a été notifié le 2 octobre 2015. Par conséquent, il aurait fallu que M. Pelletier dépose, au plus tard, le samedi le 17 octobre 2015, une date d’échance qui est étendue au premier jour ouvriable qui suit, c’est‑à‑dire, le lundi le 19 octobre 2015, sa demande de révision à la Commission pour que le délai limite de 15 jours soit respecté et qu’elle soit présentée à temps à la Commission.

 

[17]         La première communication reçue par la Commission de la part de M. Pelletier a malheureusement été envoyée par courrier ordinaire, malgré le fait d’avoir été envoyée avant l’expiration du délai de 15 jours prescrit pour l’envoi d’une demande de révision. Cette lettre était sans date, mais elle a été reçue par la Commission le 9 octobre 2015. Suivant les règles de droit énoncées dans l’arrêt Renvoi relatif à l’article 14, cette lettre ne satisfait pas aux exigences de la Loi et du Règlement SAP et ne constitue donc pas une signification valide d’une demande de révision.

 

[18]         En revanche, les subséquentes communications envoyées par M. Pelletier, bien qu’elles aient été envoyée par courriel les 20 et 21 octobre 2015 et le 20 novembre 2015, et par lettre recommandée le 13 novembre 2015 (des modes de transmission autorisés pour la présentation d’une demande), elles ne constituent pas non plus une signification valide de demande de révision parce qu’elles ont été adressées après l’expiration du délai de 15 jours prescrit pour le dépôt d’une telle demande.

 

[19]         Ce résultat peut sembler sévère et inéquitable, mais compte tenu de l’interprétation stricte donnée aux règles applicables par la CAF, la demande de révision de M. Pelletier n’est pas admissible, étant donné qu’elle n’a pas été déposée dans le délai prescrit par la loi, selon un des modes de transmission autorisés.

 

[20]         Par conséquent, comme la première lettre de M. Pelletier n’a pas été transmise conformément à l’une des méthodes de transmission autorisées et que les communications subséquentes n’ont pas été déposées dans le délai prescrit, la Commission n’a reçu aucune demande valable de révision. Malheureusement, M. Pelletier n’a pas respecté le délai qui lui était imparti ni le mode de transmission exigé par la Loi et le Règlement SAP. Il s’agit d’un défaut qui ne peut plus être corrigé par la Commission ou par M. Pelletier, compte tenu de l’interprétation proposée par la CAF dans l’arrêt Renvoi relatif à l’article 14, précité.

 

 

Dispositif

 

[21]         Par conséquent, la Commission statue que la demande de révision de la décision du ministre CS‑75790 présentée par M. Pelletier est irrecevable. En vertu de la loi, M. Pelletier est donc présumé avoir commis la violation indiquée dans l’avis de violation 3125‑15‑0073 et la sanction de 800 $ est maintenant due à l’Agence et exigible. Le paragraphe 9(3) de la Loi SAP est ainsi libellé :

 

(3)  Le défaut du contrevenant d’exercer l’option visée au paragraphe (2) dans le délai et selon les modalités prévus vaut déclaration de responsabilité à l’égard de la violation.

 

[22]         Les agents de l’Agence sont chargés de protéger les Canadiens, la chaîne alimentaire et la production agricole du Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Il ne fait aucun doute que ces tâches doivent être accomplies de façon diligente, respectueuse et responsable. Les agents de l’Agence disposent d’un certain pouvoir discrétionnaire quant à la façon de traiter les voyageurs qui ont des produits non déclarés en leur possession. Dans certaines circonstances, un avertissement oral ou un avis de violation assorti d’un avertissement délivré au titre de la Loi SAP et du Règlement SAP pourrait constituer une mesure plus juste, compatissante et humaine que la délivrance d’un avis de violation assorti d’une sanction.

 

[23]         Il ne revient toutefois pas à la Commission de revoir la procédure et le recours civil que l’Agence a choisi d’appliquer à l’égard de l’auteur de la violation. La Commission est consciente que l’Agence a mis en place sa propre façon de traiter les plaintes des Canadiens concernant les mesures prises ou ses agents, comme il est possible d’en prendre connaissance à la section intitulée « Compliments, commentaires et plaintes » du site Web de l’Agence.

 

[24]         La Commission désire informer M. Pelletier que la présente violation ne constitue pas un acte criminel. Lorsque cinq ans se seront écoulés, M. Pelletier pourra demander au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, conformément à l’article 23 de la Loi SAP, de rayer la violation de son dossier.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), en ce 7e jour du mois de décembre 2015.

 

 

 

 

 

 

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Dr Don Buckingham, président

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