Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence :     Adebogun c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile),                        2015 CRAC 24

 

Date : 20151125

Dossier : CART/CRAC‑1867

 

ENTRE :

 

Olukayode Adebogun, demandeur

 

 

‑ et ‑

 

 

Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, intimé

 

[Traduction de la version officielle en anglais]

 

 

DEVANT :                   Le président Donald Buckingham

 

 

AVEC :                           Olukayode Adebogun, s’est représenté lui-même

Melanie A. Charbonnneau, représentante pour l’intimé

 

Dans l’affaire de la demande présentée par le demandeur, en vertu de l’article 13 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire afin que la Commission révise la décision CS‑70383 par laquelle le ministre a conclu, le 14 septembre 2015, que le demandeur a enfreint l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux.

 

 

DÉCISION

 

La Commission de révision agricole du Canada STATUE que la demande de révision de la décision CS‑70383 du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, datée du 14 septembre 2015, présentée par le demandeur en date du 5 octobre 2015, en vertu de l’article 13 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, EST IRRECEVABLE, et est, conformément à la présente ordonnance, REJETÉE.  

 

Sur observations écrites seulement.


APERÇU

 

[1]              Olukayode Adebogun (M. Adebogun) a demandé à la Commission de révision agricole du Canada (Commission) de réviser et d’annuler la décision CS‑70383 du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (décision du ministre). Le ministre conclut dans sa décision que M. Adebogun a importé 27 sacs de 90 grammes de collations au bœuf épicé du Nigeria sans respecter les exigences prévues par la loi pour ce type d’importation et qu’en conséquence l’Agence des services frontaliers du Canada (agence) avait à juste titre délivré à M. Adebogun un avis de violation assorti d’une sanction de 800$.

 

[2]              Pour que sa demande soit recevable, M. Adebogun doit répondre aux critères énoncés dans la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Loi SAP), le Règlement sur sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Règlement SAP) et les Règles de la Commission de révision (Commission de révision agricole du Canada) (Règles de la Commission).

 

[3]              La seule question à trancher en l’espèce consiste à déterminer si M. Adebogun a respecté ces critères.

 

 

MOTIFS DE L’IRRECEVABILITÉ DE LA DEMANDE

 

Contexte

 

[4]              L’Agence a délivré l’avis de violation YQR‑13‑0001 à M. Adebogun à qui il est reproché d’avoir importé des produits de viande au Canada sans se conformer aux exigences prévues par la loi pour ce type d’importation. 

 

[5]              M. Adebogun a contesté l’avis de violation et demandé au ministre d’examiner les faits allégués dans l’avis de violation.

 

[6]              Le ministre a rendu sa décision le 14 septembre 2015, confirmé la délivrance de l’avis de violation par l’Agence et communiqué sa décision à M. Adebogun.

 

[7]               Le 5 octobre 2015, M. Adebogun a envoyé une lettre à la Commission par télécopieur pour lui demander de réviser et d’annuler la décision du ministre. M. Adebogun a envoyé la même documentation à la Commission, par messagerie, le 15 octobre 2015.

 

[8]              Dans son courriel du 3 novembre 2015, l’Agence a déposé à la Commission la preuve que la décision du ministre avait été notifiée à M. Adebogun le 17 septembre 2015 et elle a confirmé que la sanction de 800$ payable par M. Adebogun selon l’avis de violation n’avait pas été payée.

 

 

Question en litige

 

[9]              La seule question à trancher en l’espèce consiste à déterminer si M. Adebogun a répondu aux critères prévus pas la loi pour permettre à la Commission de se prononcer sur sa demande de révision?

 

 

Analyse

 

[10]         En vertu de la Loi SAP, du Règlement SAP et des Règles de la Commission, la Commission est tenue de rendre une décision sur la recevabilité de la demande de révision présentée par le demandeur avant de procéder à une audience complète de l’affaire.

 

[11]         Les motifs suivants constituent des obstacles à la recevabilité de la demande lorsque le demandeur : (1) a déjà payé la sanction jointe à l’avis de violation; (2) a omis de présenter une demande de révision dans le délai et selon les modalités réglementaires; ou (3) a omis de fournir une raison valable ou des motifs rendant possible la révision en sa faveur d’une décision du ministre. En l’espèce, la demande de révision présentée par M. Adebogun est visée par le deuxième motif.

 

[12]         L’alinéa 13a) et le paragraphe 14(1) du Règlement SAP énoncent les délais de rigueur prévus par la loi et les modes de notification autorisés en ce qui a trait à la présentation d’une demande de révision d’une décision du ministre par la Commission :

 

13. Lorsque le ministre est saisi d’une contestation au titre des paragraphes 8(1) ou 9(2) de la Loi et qu’il notifie la personne en cause qu’il a déterminé qu’elle a commis la violation, celle-ci peut :

 

a) demander par écrit à la Commission de dans les 15 jours suivant la date de notification;

 

[…]

 

14. (1) Une personne peut présenter une demande prévue aux articles 11, 12 ou 13 en la livrant en mains propres ou en l’envoyant par courrier recommandé ou par messagerie, ou par télécopieur ou autre moyen électronique, à une personne et à un lieu autorisés par le ministre.

 

[13]         La Cour d’appel fédérale (CAF) a donné à ces dispositions une interprétation très stricte. Par exemple, elle a conclu de façon non équivoque que le courrier ordinaire n’est pas un mode de transmission autorisé pour la présentation d’une demande visant à être entendu par la Commission sur les faits reprochés (voir Renvoi relatif à l’article 14 du Règlement sur les sanctions pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, DORS/2000‑187, 2012 CAF 130, aux paragraphes 22 à 25).

 

[14]         De la même façon, la Commission n’a pas le pouvoir d’étendre les délais fixés par la Loi SAP et le Règlement SAP pour présenter une demande de révision (voir Clare c. Canada (Procureur général) 2013 CAF 265 (Clare)). La CAF a affirmé dans cet arrêt que « [...] [l]a Commission a donc statué à juste titre qu’elle n’avait pas le pouvoir de dispenser quiconque des effets de l’application stricte des dispositions de la Loi et du règlement SAPMAA. » (au paragraphe 24).

 

[15]         Le scénario ci-dessus décrit précisément la situation dans laquelle M. Adebogun se trouve en ce qui a trait à la présentation à la Commission d’une demande de révsion d’une décision du ministre. Le délai fixé par la loi pour la transmission par M. Adebogun d’une demande de révision par un moyen autorisé était de 15 jours après la date de notification de la décision du ministre. M. Adebogun en a été notifié le 17 septembre 2015. Par conséquent, il aurait fallu que M. Adebogun dépose au plus tard le vendredi 2 octobre 2015 sa demande de révision à la Commission pour que le délai limite de 15 jours soit respecté et qu’elle soit présentée à temps à la Commission.

 

[16]         Malheureusement, la première communication transmise à la Commission par M. Adebogun a été son envoi par télécopieur reçue le 5 octobre 2015, une date postérieure à celle du délai limite de 15 jours fixé pour présenter une demande de révision, ce qui a comme conséquence d’invalider le dépôt de sa demande de révision. 

 

[17]         Par conséquent, même si cela peut sembler sévère, voire même injuste, vu l’interprétation stricte qui doit être donnée aux règles applicables, la demande de révision présentée par M. Adebogun est irrecevable parce qu’elle n’a pas été présentée dans le délai de rigueur prévu par la loi. Il s’agit d’un vice auquel il ne peut être remédié ni par la Commission ni par M. Adebogun compte tenu de l’interprétation avancée par la CAF dans l’arrêt Clare, précité. 

 

 

Dispositif

 

[18]         Par conséquent, la Commission statue que la demande de révision de la décision du ministre CS‑70383 présentée par M. Adebogun est irrecevable. En vertu de la loi, M. Adebogon est donc présumé avoir commis la violation indiquée dans l’avis de violation YQR‑13‑0001 et la sanction de 800$ est maintenant due à l’Agence et exigible. Le paragraphe 9(3) de la Loi SPA est ainsi libellé :

 

(3)  Le défaut du contrevenant d’exercer l’option visée au paragraphe (2) dans le délai et selon les modalités prévus vaut déclaration de responsabilité à l’égard de la violation.

 

[19]         Les agents de l’Agence sont chargés de protéger les Canadiens, la chaîne alimentaire et la production agricole du Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Il ne fait aucun doute que ces tâches doivent être accomplies de façon diligente, respectueuse et responsable. Les agents de l’Agence disposent d’un certain pouvoir discrétionnaire quant à la façon de traiter les voyageurs qui ont des produits non déclarés en leur possession. Dans certaines circonstances, un avertissement oral ou un avis de violation assorti d’un avertissement délivré au titre de la Loi SAP pourrait constituer une mesure plus juste, compatissante et humaine que la délivrance d’un avis de violation assorti d’une sanction.

 

[20]         Il ne revient toutefois pas à la Commission de revoir la procédure et le recours civil que l’Agence a choisi d’appliquer à l’égard de l’auteur de la violation. La Commission est consciente que l’Agence a mis en place sa propre façon de traiter les plaintes des Canadiens concernant les mesures prises ou ses agents, comme il possible d’en prendre connaissance à la section intitulée « Compliments, commentaires et plaintes » du site Web de l’Agence.  

 

[21]         La Commission désire informer M. Adebogun que la présente violation ne constitue pas un acte criminel. Lorsque cinq ans se seront écoulés, M. Adebogun pourra demander au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, conformément à l’article 23 de la Loi SAP, de rayer la violation de son dossier.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), ce 25e jour de novembre 2015.

 

 

 

 

 

 

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Dr Don Buckingham, président

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