Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence :     Seepaul c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2015 CRAC 13

 

 

Date : 20150727

Dossier : CART/CRAC‑1829

ENTRE :

 

Praimdassie Seepaul, demanderesse

 

 

‑ et ‑

 

 

Agence des services frontaliers du Canada, intimée

 

[Traduction de la version officielle en anglais]

 

DEVANT :       Donald Buckingham, président

 

 

AVEC :              Praimdassie Seepaul, qui se représente elle-même

Melanie A. Charbonneau, représentante de l’intimée

 

 

Affaire intéressant une demande de révision des faits présentée par la demanderesse en vertu de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, relativement à une violation, alléguée par l’intimée, de l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux.

 

DÉCISION SUR L’ADMISSIBILITÉ

 

La Commission de révision agricole du Canada ORDONNE que la demande de révision visant l’avis de violation 4974‑15‑0322 daté du 13 mai 2015, présentée par la demanderesse Praimdassie Seepaul en vertu de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, relativement à l’allégation de l’Agence des services frontaliers du Canada selon laquelle la demanderesse a contrevenu à l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux, EST INADMISSIBLE et est, conformément à la présente ordonnance, REJETÉE.

 

Observations écrites seulement.


Motifs de l’inadmissibilité

 

[1]              Dans l’avis de violation 4974‑15‑0322, daté du 13 mai 2015, l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence) allègue que le jour même, à l’aéroport 4974 (l’aéroport international Pearson) de Toronto (Ontario), la demanderesse, Praimdassie Seepaul (Mme Seepaul) a commis une infraction, soit l’importation d’un sous‑produit animal sous forme de poulet, sans répondre aux exigences prescrites, ce qui contrevenait à l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux (le Règlement SA). Le 13 mai 2015, l’Agence a signifié en personne un avis de violation à Mme Seepaul.

 

[2]              Dans l’avis de violation, Mme Seepaul est avisée que les faits allégués constituent une violation au titre de l’article 7 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (la Loi sur les SAP) et à l’article 2 du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (le Règlement sur les SAP). De plus, la violation alléguée est qualifiée de « violation grave » au titre de l’article 4 du Règlement sur les SAP, pour laquelle la sanction prescrite est de 800 $.

 

[3]              Dans une lettre datée du 19 mai 2015, qui a été envoyée par courrier recommandé le 1er juin 2015 et reçue par la Commission de révision agricole du Canada (la Commission) le 3 juin 2015, Mme Seepaul a déposé, en vertu de l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les SAP, une demande de révision (la demande de révision), dans laquelle elle demande à la Commission de réviser les faits sous‑jacents à l’avis de violation qui lui a été signifié. En vue de préserver les droits que lui confère la Loi sur les SAP, Mme Seepaul n’avait pas acquitté la sanction qu’on lui avait imposée.

 

La demande de révision de Mme Seepaul consiste en une lettre d’une page, la copie de l’avis de violation 4974‑15‑0322, et d’un document intitulé « Reçu global pour éléments non monétaires – No. B100968 ». La lettre d’une page de Mme Seepaul est libellée ainsi [traduction] :

 

[4]               

 

            Le 19 mai 2015

 

Bonjour,

 

J’aimerais que l’on procède à une révision des faits relativement à une violation. Je joins tous les documents que l’on m’a donnés.

 

Praimdassie Seepaul

 

...

 

[5]              La Commission a mentionné ce qui suit à l’Agence et à Mme Seepaul dans une lettre datée du 5 juin 2015 [traduction] :

 

 

Comme vous le savez peut‑être, les Règles de la Commission (Agriculture et Agroalimentaire), DORS/99‑451 (les anciennes Règles) ont été abrogées le 8 mai 2015 et remplacées par les Règles de la Commission de révision (Commission de révision agricole du Canada) (les nouvelles Règles), dont une copie tirée de la Gazatte du Canada est jointe aux présentes.

 

Comme l’exige l’article 29 des nouvelles Règles, la Commission accuse réception par la présente de la demande de révision présentée par la demanderesse (le numéro d’avis de violation n’a pas été fourni par la demanderesse). Une copie de la demande de révision, telle qu’envoyée par la demanderesse, est jointe à la présente.

 

Par conséquent, la Commission demande ce qui suit :

 

1.       que l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence), ou son représentant ou conseiller juridique, fournisse les renseignements nécessaires pour pleinement se conformer aux exigences exposées à l’article 30 des nouvelles Règles, au plus tard le lundi 22 juin 2015, soit 15 jours suivant la date d’envoi de la présente lettre;

 

2.       que P. Seepaul (la demanderesse), ou son représentant ou conseiller juridique, fournisse les renseignements nécessaires pour pleinement se conformer aux exigences exposées à l’article 31 des nouvelles Règles, au plus tard le lundi 22 juin 2015, soit 15 jours suivant la date d’envoi de la présente lettre.

 

Ensuite, conformément à l’article 32 des nouvelles Règles, et sur fondement des renseignements transmis à la Commission, la Commission rendra une décision quant à la question de l’admissibilité de la présente demande dans les 60 jours suivant l’envoi de la présente lettre et transmettra sans tarder sa décision aux parties.

 

 

[6]              Par des courriels datés du 18 juin 2015 et du 25 juin 2015, l’Agence a transmis les renseignements prescrits par l’article 30 des nouvelles Règles de la Commission. La Commission n’a reçu, à la date limite du 22 juin 2015, aucune documentation de la part de Mme Seepaul.

 

Par conséquent, par lettre datée du 25 juin 2015, la Commission a envoyé une deuxième lettre à Mme Seepaul, dans laquelle elle mentionnait ce qui suit [traduction]

 

[7]               

 

Le 3 juin 2015, la Commission de révision agricole du Canada (la Commission) a reçu votre demande initiale de révision par courrier recommandé. Le 5 juin 2015, la Commission a envoyé une lettre aux parties, dans laquelle elle vous invitait à vous conformer aux exigences prescrites à l’article 31, et invitait l’Agence à se conformer aux exigences prévues à l’article 30.

 

...

 

À cet égard, la présente constitue la dernière possibilité pour vous de donner des détails supplémentaires quant à l’incident du 13 mai 2015 pour appuyer votre allégation selon laquelle l’avis de violation est invalide. Si nous ne recevons pas de tels renseignements, votre demande de révision sera déclarée inadmissible et pourrait entraîner le prononcé, par la Commission, d’une ordonnance rejetant votre demande. Par conséquent, vous devez vous conformer à l’article 31 des nouvelles Règles, au plus tard le jeudi 16 juillet 2015.

 

 

[8]              La Commission n’avait rien reçu de Mme Seepaul à la date limite du 16 juillet 2015. Cependant, cette dernière a bel et bien envoyé une lettre par la poste régulière, lettre qui était datée du 12 juillet 2015 et que la Commission a reçue le 21 juillet 2015. La lettre d’une page faisait état de certains renseignements personnels supplémentaires et contenait aussi des coordonnées, mais malheureusement, ne soulevait aucun motif à l’appui de la demande de révision.

 

 

Analyse et droit applicable

 

[9]              Lorsqu’un demandeur ne répond pas aux exigences de la Loi sur les SAP, du Règlement sur les SAP et des règles de procédure de la Commission, la Commission peut juger que la demande de révision présentée par le demandeur est inadmissible.

 

[10]         La Commission à plusieurs reprises sous le régime de ses anciennes Règles a traité de questions liées à l’admissibilité, par exemple, dans la décision Wilson c. Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2013 CRAC 25 (Wilson), où la Commission a écrit ce qui suit :

 

[10]  La demande de révision est un droit accordé par le législateur, qui permet aux demandeurs de faire réviser les avis de violation par un organisme indépendant, à peu de frais et sans avoir à y consacrer beaucoup de temps. Toutefois, l’accomplissement de tout le processus, y compris le dépôt des actes de procédure, l’audience et l’élaboration de la décision, exigera tout de même un investissement substantiel en temps et en argent de toutes les parties. C’est pourquoi le législateur impose aux demandeurs des exigences élémentaires à respecter afin de préserver leur droit. Lorsqu’un demandeur ne se conforme pas aux exigences de la Loi, des Règlements ou des Règles, la Commission peut déclarer la demande de révision irrecevable.

 

[11]         La Commission a aussi tenu des propos similaires quant à la recevabilité dans les décisions Soares c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRAC 39, Salim c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2014 CRAC 18, Asare c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2014 CRAC 37, Ajibowu c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2014 CRAC 38, Wen c. Canada (Agence des services frontaliers du Canada), 2014 CRAC 39.

 

[12]         Selon les nouvelles Règles de la Commission, lesquelles sont entrées en vigueur le 8 mai 2015, elle a maintenant l’obligation, avant de procéder à une audience complète quant à une affaire, de rendre une décision écrite quant à l’admissibilité d’une demande de révision des faits sous‑jacents à un avis de violation, conformément à l’article 32 des nouvelles Règles de la Commission.

 

[13]         Pour parvenir à sa décision quant à l’admissibilité, la Commission examinera, entre autres choses, le caractère adéquat des motifs soulevés par la demanderesse à l’appui de sa demande. Cependant, la Commission ne peut tenir compte des moyens de défense qui ne sont pas permis au sens du paragraphe 18(1) de la Loi sur les SAP. S’il n’y a pas de motifs, selon les documents produits par les parties conformément aux articles 30 et 31 des nouvelles Règles de la Commission, pour lesquels la demanderesse pourrait possiblement avoir gain de cause, la Commission déclarera alors que la demande de révision est inadmissible. La Commission a rendu une telle conclusion tout récemment en ce qui concerne une demande de révision visant une décision du ministre dans la décision Stracinski c. (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2015 CRAC 11, ainsi qu’à l’égard d’une demande de révision d’un avis de violation dans la décision Steele c. Agence canadienne des services frontaliers, 2015 CRAC 12.

 

[14]         En l’espèce, la Commission à au moins deux reprises, a expliqué à Mme Seepaul qu’elle devait faire valoir, dans sa demande de révision, des motifs qui répondaient aux critères de donner un certain fondement sur lequel la validité de l’avis de violation pourrait être contestée. Mme Seepaul a aussi été informée des conséquences qu’entraînerait l’omission de donner des détails quant à la raison pour laquelle elle alléguait que l’avis de violation était invalide. Cependant, dans sa correspondance laconique avec la Commission, Mme Seepaul n’a présenté aucun renseignement ou motif à l’appui de sa demande.

 

[15]         Lorsqu’une contravention à l’article 40 du Règlement SA est alléguée à titre de fondement pour la délivrance d’un avis de violation conformément à la Loi sur les SAP et au Règlement sur les SAP, seuls deux éléments essentiels doivent être prouvés par l’Agence, selon la prépondérance des probabilités :

 

         Élément 1 – Mme Seepaul est la personne qui a commis l’infraction;

 

         Élément 2 – Mme Seepaul a importé un sous‑produit animal (poulet) au Canada.

 

[16]         Selon la preuve contenue au dossier, les deux éléments peuvent être démontrés. De plus, selon le dossier dont dispose la Commission, Mme Seepaul ne conteste ni l’un ni l’autre des éléments en question. Essentiellement, cette dernière n’a donné aucun motif dans ses observations pour faire ressortir des faits, hormis ceux qui appuieraient la délivrance d’un avis de violation en l’espèce.

 

[17]         La Loi sur les SAP crée un régime de responsabilité qui ne permet pas une grande tolérance. Mme Seepaul n’a fait valoir aucun fait à l’appui de sa demande. Elle a aussi omis de présenter tout moyen de défense autorisé par l’article 18 de la Loi sur les SAP, lequel prévoit ce qui suit :

 

18(1) Le contrevenant ne peut invoquer en défense le fait qu’il a pris les mesures nécessaires pour empêcher la violation ou qu’il croyait raisonnablement et en toute honnêteté à l’existence de faits qui, avérés, l’exonéreraient.

 

[18]         Lorsqu’une disposition relative à une SAP a été adoptée pour une contravention bien précise, comme c’est le cas pour l’article 40 du Règlement SA, le demandeur dispose d’une très faible marge de manœuvre pour présenter une défense. L’article 18 de la Loi sur les SAP exclut bon nombre des motifs fréquemment invoqués par les demandeurs pour justifier leur geste lorsqu’un avis de violation leur a été délivré. Compte tenu de l’intention claire du législateur quant à la question des moyens de défense interdits et permis, la Commission conclut que Mme Seepaul n’a fait valoir aucun motif qui constituerait une défense autorisée au titre de l’article 18 de la Loi sur les SAP.

 

[19]         Par conséquent, la Commission déclare inadmissible la demande de révision présentée par Mme Seepaul relativement à l’avis de violation 4974‑15‑0322, parce que, selon les documents produits par les parties au titre des articles 30 et 31 des nouvelles Règles de la Commission, Mme Seepaul n’a fait valoir aucun motif lui permettant d’avoir gain de cause quant à son allégation selon laquelle l’avis de violation daté du 13 mai 2015 n’est pas prouvé.

 

[20]         Par conséquent, Mme Seepaul est réputée avoir commis l’infraction visée dans l’avis de violation 4974‑15‑0322 qui lui a été signifié le 13 mai 2015. Le paragraphe 9(3) de la Loi sur les SAP prévoit ce qui suit :

 

(3)  Le défaut du contrevenant d’exercer l’option visée au paragraphe (2) dans le délai et selon les modalités prévus vaut déclaration de responsabilité à l’égard de la violation.

 

[21]         La Commission a examiné ces questions à la lumière des dispositions de la Loi sur les SAP, du Règlement sur les SAP, de ses nouvelles règles de procédure, des précédents applicables et des observations produites par les parties.

 

[22]         Les agents de l’Agence sont chargés de protéger les Canadiens et les Canadiennes, la chaîne alimentaire et la production agricole du Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Il ne fait aucun doute que ces tâches doivent être accomplies sérieusement. La Commission est consciente que l’Agence a mis en place sa propre façon de traiter les plaintes des voyageurs visant ses inspecteurs, lorsque les actes des inspecteurs envers les voyageurs deviennent excessifs.

 

[23]         De plus, les agents de l’Agence ont le pouvoir discrétionnaire dans leur traitement des voyageurs qui ont en leur possession des produits non déclarés. Lorsqu’ils découvrent des biens non déclarés, les agents peuvent donner aux voyageurs un avertissement, un avis de violation écrit accompagné d’un avertissement ou un avis de violation par écrit accompagné d’une sanction au titre de la Loi sur les SAP. Cependant, le rôle de la Commission n’est pas d’examiner la procédure et les recours civils pris par l’Agence à l’encontre d’un contrevenant allégué.

 

[24]         Le régime très rigoureux de SAP établi par le législateur dans la Loi sur les SAP protège les systèmes agricoles et alimentaires du Canada contre la contamination et les maladies. Les sanctions prévues à la Loi, comme c’est le cas en l’espèce, peuvent néanmoins avoir d’importantes répercussions pour des Canadiens, surtout pour une personne dans la situation de Mme Seepaul. La capacité du tribunal d’accorder une réparation découle uniquement de sa loi habilitante. Selon ces lois, la commission n’a ni le mandat, ni la compétence d’annuler ou de déclarer invalide un avis de violation pour des motifs d’ordre humanitaire ou financier. Cependant, Mme Seepaul peut communiquer avec les représentants de l’Agence pour se renseigner à savoir si cette dernière accepterait de mettre sur pied un calendrier des paiements ou de prendre un quelconque autre arrangement quant à l’amende.

 

[25]         Le Tribunal souhaite informer Mme Seepaul que la contravention ne constitue pas une infraction criminelle. Après cinq ans, elle aura le droit de présenter une demande au ministre en vue de rayer la contravention du dossier, en vertu de l’article 23 de la Loi sur les SAP, lequel prévoit ce qui suit :

 

23. (1)  Sur demande du contrevenant, toute mention relative à une violation est rayée du dossier que le ministre tient à son égard cinq ans après la date soit du paiement de toute créance visée au paragraphe 15(1), soit de la notification d’un procès-verbal comportant un avertissement, à moins que celui-ci estime que ce serait contraire à l’intérêt public ou qu’une autre mention ait été portée au dossier au sujet de l’intéressé par la suite, mais n’ait pas été rayée.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), ce 27ième jour du mois de juillet 2015.

 

 

 

 

 

 

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Don Buckingham, président

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