Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence :         Vanee livestock Ltd. c. Canada  (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2017 CRAC 8

 

 

 

 

Date : 20170303

Dossier : CRAC/CART-1941

 

 

 

 

 

 

 

 

ENTRE :

 

 

 

 

 

 

 

Vanee Livestock Ltd.,

 

 

DEMANDERESSE

‑ et ‑

 

 

 

 

 

Agence canadienne d’inspection des aliments,

INTIMÉE

 

 

 

 

[Traduction de la version officielle en anglais]

 

DEVANT :

Le président Donald Buckingham

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AVEC :

Ray Vanee, représentant de la demanderesse; et

 

 

Sarah Grenier, représentante de l’intimée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Affaire concernant une demande présentée par la demanderesse, conformément à l’alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, pour une révision des faits par rapport à la violation  du paragraphe 177(1) du Règlement sur la santé des animaux, alléguée par l’intimée.

 Montréal,  Montreal, PQ,

DÉCISION

 

La Commission de révision agricole du Canada STATUE, par ordonnance, que la demande de révision du procès-verbal no 1617WA0127, en date du 23 novembre 2016, présentée par la demanderesse, Vanee Livestock Ltd., en vertu de l'alinéa 9(2)c) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire, relativement à une violation par la demanderesse du paragraphe 177(1) du Règlement sur la santé des animaux,  alléguée par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, EST INADMISSIBLE et est, conformément à la présente ordonnance, REJETÉE.

 

Sur observations écrites seulement.


APERÇU

 

[1]              La société Vanee Livestock Ltd. (ci-après « Vanee ») a saisi la Commission de révision agricole du Canada (ci-après « la Commission ») d’une contestation des faits concernant un procès-verbal rendu par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ci-après « l’Agence ») et comportant une sanction de 1 300 $, parce que l’employé de Vanee aurait transporté, le 8 août 2016, quatre animaux qui ne portaient pas les étiquettes auriculaires d’identification approuvées par l’Agence canadienne d’identification du bétail (ACIB).

 

[2]              Pour que la demande de la société soit admissible, Vanee doit satisfaire au critère d’admissibilité, en établissant l’existence d’un fondement valable susceptible de lui permettre d’obtenir gain de cause en l’espèce devant la Commission.

 

[3]              Pour les motifs qui suivent, je conclus que Vanee n’a pas satisfait à ce critère d’admissibilité.

 

 

MOTIFS RELATIFS À L’INADMISSIBILITÉ DE LA DEMANDE

 

Contexte

 

[4]              L’Agence a émis le procès-verbal 1617WA0127, daté du 23 novembre 2016 à l’égard de Vanee au motif que cette dernière a [traduction] « transport[é] ou fai[t] transporter un animal ou une carcasse d’animal qui ne portait pas d’étiquette approuvée », un acte qui contrevient au paragraphe 177(1) du Règlement sur la santé des animaux (le Règlement SA). La violation alléguée est considérée comme « mineure » au sens de l’article 4 du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (le Règlement sur les SAP), qualification qui commande un avertissement ou une sanction de 1 300 $ lorsque la violation survient dans le cadre d’une entreprise, comme c’est le cas en l’espèce.

 

[5]              Le 4 décembre 2016, Vanee est réputée avoir reçu la signification, par l’Agence, du procès-verbal avec sanction de 1 300$.

 

[6]              Dans une lettre envoyée par télécopie le 3 janvier 2017, Vanee a demandé, sans toutefois énoncer de motifs à l’appui de sa demande, que la Commission l’entende sur les faits reprochés dans le procès-verbal, conformément à la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Loi sur les SAP).

 

[7]              Par une lettre datée du 11 janvier 2017, la Commission a demandé à Vanee de produire, au plus tard le 26 janvier 2017, tous les renseignements nécessaires, comme l’exige l’article 31 des Règles de la Commission de révision (Commission de révision agricole du Canada) (Règles de la Commission), afin d’aider celle‑ci à statuer sur l’admissibilité de la demande. Une copie des Règles de la Commission était jointe à la lettre.

 

[8]              Le 27 janvier 2017, la Commission a demandé une deuxième fois à Vanee de fournir, cette fois-ci, au plus tard le 16 février 2017, davantage de détails sur l’incident du 8 août 2016 qui a entraîné la délivrance du procès-verbal en question, afin de satisfaire aux exigences de l’alinéa 31d) des Règles de la Commission. La Commission a informé Vanee que si elle ne fournissait pas ces renseignements, sa demande de révision risquait d’être déclarée inadmissible par la Comission et rejetée par voie d'une ordonnance.

 

[9]              Le 14 février 2017, M. Ray Vanee, agissant pour le compte de Vanee, a fourni une lettre d’une page, envoyée par télécopie, qui énonçait les motifs de sa demande de révision.

 

 

Question en litige

 

[10]         La seule question en litige en l’espèce est la suivante : Vanee a-t-elle satisfait aux critères d’admissibilité de la Commission en établissant un certain fondement acceptable qui lui permettrait d’obtenir gain de cause en l’espèce?

 

 

Analyse et droit applicable

 

[11]         La demande de révision est un droit accordé par le législateur, qui permet aux demandeurs de faire réviser les procès-verbaux par un organisme indépendant, à peu de frais et sans avoir à y consacrer beaucoup de temps. Toutefois, l’ensemble du processus, y compris le dépôt des actes de procédure, l’audience et la rédaction de la décision, exigera tout de même de toutes les parties un investissement substantiel en temps et en argent. C’est la raison pour laquelle le législateur impose aux demandeurs des exigences de base à respecter afin de préserver leurs droits. Lorsque le demandeur ne respecte pas les exigences de la Loi sur les SAP, du Règlement sur les SAP et des Règles de la Commission, celle-ci peut décider que la demande de révision du demandeur est inadmissible.

 

[12]         La demande est inadmissible si le demandeur : (1) a déjà payé la sanction infligée dans le procès-verbal; (2) a omis de déposer la demande de révision selon les modalités et dans les délais prescrits; (3) a omis de fournir un motif valable pour que la Commission révise la décision de l’Agence.

 

[13]         Sont considérés comme des motifs valables, tout renseignement fourni par le demandeur selon lequel la prétendue violation n’a pas eu lieu ou que la personne désignée dans le procès-verbal n’est pas celle qui a commis la violation.

 

[14]         Les moyens de défense inadmissibles comprennent ceux qui sont expressément exclus au titre de la Loi sur les SAP, à savoir que le demandeur a essayé de ne pas commettre la violation (la diligence raisonnable), ou que le demandeur s’est trompé au sujet des faits qui ont mené à la perpétration de la violation (l’erreur de fait).

 

[15]         En l’espèce, la Commission a reçu peu d’explications de la part de Ray Vanee sur les raisons pour lesquelles il croit que la société avait à juste titre transporté, le 8 août 2016, quatre bovins dont aucun ne portait d’étiquette auriculaire approuvée par l’ACIB.

 

[16]         Ray Vanee a fourni à la Commission les motifs suivants à l’appui de la demande de révision de Vanee :

 

(a)        Le producteur qui a élevé et à ensuite transporté l’animal au marché aux enchères est celui qui doit être responsable de poser les étiquettes sur l’animal en question;

 

(b)        Les responsables de la vente aux enchères doivent vérifier que tous les animaux sont porteurs des étiquettes adéquates avant de vendre les animaux à un nouveau propriétaire, ce qui n’a pas été fait en l’espèce;

 

(c)         En conséquence, il incombe ultimement au producteur, et ensuite aux responsables de la vente aux enchères, de poser les étiquettes sur les animaux et de s’assurer que les animaux portent les étiquettes;

 

(d)        Lorsque Vanee emporte les animaux en vue du transport, ils sont apportés aux camions de la société en groupe de 30 à 40 têtes. Le chargement peut se faire dans des conditions sombres, pluvieuses, enneigées ou de froid extrême et Vanee n’est pas en mesure de faire monter les animaux un à un pour vérifier leurs étiquettes;

 

(e)        Vanee est d’avis qu’on fait peser sur elle une responsabilité quasiment impossible à assumer;

 

(f)          Les dispositions législatives et réglementaires en vigueur qui imposent des responsabilités sur les transporteurs parce qu’ils n’ont pas posé les étiquettes sur les animaux qu’ils transportent paraissent très déraisonnables.

 

[17]         Aucun des motifs invoqués ne révèle un fondement qui permettrait à Vanee d’avoir gain de cause dans la demande qu’elle a présentée afin que la Commission conclue qu’elle n’a pas commis les prétendues violations. Vanee ne nie pas non plus que la prétendue violation a été commise.

 

[18]         Les motifs (a), (b) et (c) avancés par Vanee ne sont pas pertinents eu égard à la violation invoquée. La question à déterminer ne porte pas sur ce que le producteur ou le marché aux enchères a fait ou aurait dû faire, mais plutôt sur ce que Vanee a fait ou aurait dû faire concernant le transport d’animaux effectué par la société le 8 août 2016. Le Règlement SA permet à l’Agence d’infliger des sanctions pécuniaires à tout acteur, du producteur à l’abattoir, qui transporte ou fait transporter des animaux ne portant pas les étiquettes approuvées. En l’espèce, l’Agence a choisi, selon son pouvoir discrétionnaire, d’infliger une sanction pécuniaire à Vanee, le transporteur. À moins que ce pouvoir discrétionnaire ne soit exercé de mauvaise foi ou à des fins inappropriées, un tribunal chargé de la révision ou une cour n’a pas le loisir de modifier le choix fait par l’Agence. Rien n’indique en l’espèce que la décision d’infliger une sanction à Vanee a été prise de mauvaise foi ou à des fins inappropriées.

 

[19]         Les motifs (d) et (e) avancés par Vanee sont inadmissibles, selon l’article 18 de la Loi sur les SAP (et le paragraphe 11 de l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Doyon c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 152), qui exclut les moyens de défense fondés sur l’erreur de fait (c’est-à-dire que le demandeur a commis une erreur portant sur les faits qui ont conduit à la perpétration de la violation) et la diligence raisonnable (c’est-à-dire que le demandeur a fait de son mieux pour empêcher la violation).

 

[20]         Enfin, le motif (f) pourrait être une déclaration juste, mais il ne s’agit pas d’un motif sur lequel notre Commission peut se baser pour décider que la violation alléguée est sans fondement. D’autres moyens, notamment des efforts politiques en vue de changements législatifs, semblent plus appropriés pour solliciter la modification ou l’annulation de dispositions législatives ou réglementaires « déraisonnables ». Tel que la loi est actuellement rédigée, la violation en question entraîne la responsabilité absolue et Vanee n’a fourni aucun motif pour conclure que l’Agence aurait commis une erreur lorsqu’elle a délivré la violation. Vanee ne conteste pas qu’elle a transporté, le 8 août 2016, un animal sans étiquette.

 

[21]         La Commission sait que l’Agence dispose de sa propre procédure pour la révision des plaintes déposées par les Canadiens et les Canadiennes à l’encontre de ses actions ou ceux de ses agents, comme cela ressort de l’Énoncé des droits et des services à l’intention des producteurs, des consommateurs et autres intervenants, qui est disponible sur le site Web de l’Agence. En définitive, les inspecteurs de l'Agence sont chargés de protéger les Canadiens et les Canadiennes, la chaîne alimentaire et la production agricole du Canada contre les risques que représentent les menaces biologiques pour les plantes, les animaux et les humains. Les dispositions législatives et réglementaires contenues dans la Loi sur la santé des animaux et le Règlement sur la santé des animaux concernant l’étiquetage des animaux font partie du plan que le législateur avait lorsqu’il a établi une telle protection.

 

 

Dispositif

 

[22]         Par conséquent, la Commission statue, par ordonnance, que la demande de révision  du procès-verbal 1617WA0127 est inadmissible. De plus, par application du paragraphe 9(3) de la Loi sur les SAP, Vanee est réputée avoir commis la violation mentionnée dans le procès-verbal avec sanction, de sorte que la sanction de 1 300$ est payable à l’Agence.

 

[23]         Vanee voudra peut-être communiquer directement avec les représentants de l’Agence pour  savoir s’ils accepteraient de s’entendre sur un échéancier des paiements pour la sanction infligée.

 

[24]         La violation en cause ne constitue pas une infraction criminelle. Après cinq ans, Vanee pourra demander au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire que cette violation soit rayée de son dossier, conformément à l’article 23 de la Loi sur les SAP.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), le 3e jour du mois de mars 2017.

 

 

 

 

 

 

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Donald Buckingham, président

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