Décisions de la Commission de révision agricole du Canada

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Référence :    Patterson c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2017 CRAC 6

 

Date : 20170209

Dossiers : CART/CRAC‑1932

 

ENTRE :

 

Mark Patterson,

DEMANDEUR

 

 

‑ et ‑

 

 

Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile,

INtIMÉ

 

 

 

DEVANT :       Le président Donald Buckingham

 

 

AVEC :            M. Michael Dibua, avocat du demandeur;

Sherri‑Lynn Foran et Michèle Hobbs, représentantes de l’intimé

 

 

Affaire concernant la demande de révision présentée par le demandeur, conformément au paragraphe 13(2) de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, afin que la Commission révise la décision 16-01927 datée du 7 novembre 2016, par laquelle le ministre a conclu que le demandeur a, le 29 avril 2016, enfreint l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux.

 

DÉCISION

 

La Comission de révision agricole du Canada STATUE, par ordonnance, que la demande de révision de la décision du ministre 16‑01927, datée du 7 novembre 2016, présentée par le demandeur, Mark Patterson, EST IRRECEVABLE et, conformément à l’ordonnance, REJETÉE.

 

Sur observations écrites seulement.


APERÇU

 

[1]              Il s’agit ici de savoir si la Commission agricole du Canada (la Commission) doit confirmer, modifier ou annuler la décision du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (décision du ministre) d’imposer une sanction à Mark Patterson (M. Patterson) pour avoir importé des galettes de bœuf et de fromage sans en informer, comme il le devait, les agents de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence).

 

[2]              La décision du ministre du 7 novembre 2016 confirme l’avis de violation no 4971‑16‑0718 délivré à M. Patterson par l’Agence le 29 avril 2016 à la suite des évènements qui ont eu lieu à la même date en contravention de l’article 40 du Règlement sur la santé des animaux (le Règlement sur la SA).

 

[3]              Le 14 novembre 2016, M. Patterson a demandé à la Commission de réviser la décision du ministre.

 

[4]              Dans sa demande (demande de révision), M. Patterson a indiqué pourquoi, selon lui, la Commission ne devrait pas confirmer la décision du ministre du 7 novembre 2016, conformément à la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (la Loi sur les SAP).

 

[5]              Pour que sa demande soit recevable, M. Patterson doit satisfaire au critère de recevabilité, en établissant l’existence d’un fondement valable susceptible de lui obtenir gain de cause en l’espèce.

 

[6]              Pour les motifs qui suivent, je conclus que M. Patterson n’a pas satisfait à ce critère de recevabilité pour la demande de révision qu’il a présentée et que la décision du ministre doit par conséquent être confirmée.

 

 

MOTIFS POUR LESQUELS LA DEMANDE EST IRRECEVABLE

 

Question en litige

 

[7]              Il n’y a qu’une seule question en litige en l’espèce : M. Patterson a-t-il satisfait au critère de recevabilité de la Commission en établissant l’existence d’un fondement valable susceptible de lui permettre d’avoir gain de cause en l’espèce?

 

 

Analyse et droit applicable

 

[8]              La Commission est un tribunal expert et indépendant constitué par le Parlement en vertu de la Loi sur les produits agricoles au Canada, L.R.C., 1985, ch. 20 (4e suppl.) (la Loi sur les PAC). Elle a compétence pour répondre aux demandes de révision de décisions relatives à l’imposition de sanctions pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire.

 

[9]              La Loi sur les SAP prévoit que la Commission peut réviser une décision de première instance rendue par le ministre (paragraphe 12(2) et paragraphe 13(2) de la Loi sur les SAP).

 

[10]         Les pouvoirs que le Parlement a conférés à la Commission pour s’acquitter de ses fonctions sont prévus au paragraphe 14(1) de la Loi sur les SAP : « Saisie d’une affaire au titre de la présente loi, la Commission, par ordonnance et selon le cas, soit confirme, modifie ou annule la décision du ministre... ».

 

[11]         La demande de révision est un droit accordé par le législateur, qui permet aux demandeurs de faire réviser leurs avis de violation, ou les décisions du ministre concernant de tels avis, par un organisme indépendant, à des coûts minimums et sans devoir y consacrer beaucoup de temps. Néanmoins, la réalisation du processus, notamment le dépôt des actes de procédure, l’audience et l’élaboration de la décision, exigera tout de même un investissement substantiel en temps et en argent de toutes les parties. C’est pourquoi le législateur impose aux demandeurs des exigences élémentaires à respecter pour préserver leur droit. Lorsque le demandeur ne respecte pas les exigences de la Loi sur les SAP, du Règlement sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire (Règlement sur les SAP) et les Règles de la Commission (Commission de révision agricole du Canada) (Règles de la Commission), la Commission peut décider que la demande de révision est irrecevable.

 

[12]         Pour parvenir à annuler la décision du ministre devant la Commission, le demandeur peut notamment démontrer que la violation alléguée n’a pas été commise ou que la personne nommée dans l’avis de violation n’est pas celle qui a commis la violation. Le demandeur peut également soulever un moyen de défense admissible ou une justification des gestes qu’il a posés.

 

[13]         En l’espèce, M. Patterson a indiqué les motifs suivants dans sa demande de révision du 14 novembre 2016 et dans une lettre antérieure adressée à l’Agence le 9 mai 2016 :

 

a.       M. Patterson rentrait au Canada après un séjour en Jamaïque où il a acheté des galettes, convaincu qu’elles ne contenaient que du fromage;

 

b.      même s’il était très surpris d’apprendre que les galettes contenaient autre chose que du fromage, M. Patterson a admis que les galettes contenaient de la viande et du fromage;

 

c.       M. Patterson affirme ce qui suit [TRADUCTION] : « J’ai indiqué à l’agent que je transportais des galettes de fromage, mais, dans le formulaire de déclaration, j’ai répondu “non” à la question lorsqu’on m’a interrogé à l’Aérport Pearson, car j’ai toujours cru que seule la viande était interdite »;

 

d.      la valeur des galettes était inférieure à 15 $ CAD;

 

e.       les articles ont été détruits;

 

f.        M. Patterson affirme ce qui suit [TRADUCTION] : « Un des agents m’a dit que je recevrais un avertissement, car il s’agissait de ma première violation; en effet, un avertissement est habituellement remis pour les premières infractions »;

 

g.       M. Patterson indique ce qui suit [TRADUCTION] : « Je suis un citoyen canadien respectueux de la loi et je n’ai jamais enfreint aucune loi. Je fais des allers-retours entre Toronto et la Jamaïque depuis cinq années sans n’avoir jamais été reconnu coupable d’aucune violation. Je suis mécanicien, je suis une personne simple, j’ai commis une erreur de bonne foi et je ne suis pas en mesure de payer une amende aussi élevée, car je dois subvenir au besoin de mes deux filles. Selon moi, la loi doit être appliquée avec compassion dans l’intérêt général de la population. Je vous demande de bien vouloir annuler la sanction ou la réduire pour qu’elle corresponde à la valeur des galettes. J’ai appris une bonne leçon et je ne répéterais pas mon erreur. » 

 

[14]         Lorsque l’agence s’acquitte du fardeau de preuve relativement aux éléments de la violation alléguée, comme le ministère l’a conclu dans la présente affaire, le demandeur est considéré comme ayant commis la violation dans le cadre du système des SAP, à moins qu’il puisse faire valoir un moyen de défense ou une excuse valable, conformément à la Loi sur les SAP, au Règlement sur les SAP, ou dans les affaires qui nous occupent, au Règlement sur la SA.

 

[15]         Il n’existe aucun motif sur le fondement duquel M. Patterson pourrait obtenir gain de cause dans la demande qu’il a présentée afin que la Commission décide qu’il n’a pas commis la violation alléguée.

 

[16]         Les motifs (a), (b), et (c) soulevés par M. Patterson ne sont pas recevables aux termes de l’article 18 de la Loi sur les SAP (et de l’arrêt Doyon c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 152, au paragraphe 11, rendu par la Cour d’appel fédérale), qui interdit la défense d’erreur de fait (c’est-à-dire que le demandeur s’est trompé au sujet des faits qui ont mené à la perpétration de la violation) et de diligence raisonnable (c’est-à-dire que le demandeur a fait de son mieux pour ne pas commettre la violation).

 

[17]         Les motifs (d) et (e) soulevés par M. Patterons sont sans importance en l’espèce.

 

[18]         Le motif (f) soulevé par M. Patterson porte sur la discrétion de l’Agence d’imposer une sanction ou de donner un avertissement. À moins que la discrétion soit exercée de mauvaise foi ou en vue de fins inappropriées, une instance révisionnelle ou un tribunal d’instance supérieure n’est pas libre de modifier le choix de l’Agence. Rien n’indique en l’espèce que la décision d’imposer à M. Patterson une sanction plutôt que de lui donner un avertissement a été prise de mauvaise foi ou à des fins inappropriées.

 

[19]         Le motif (g) soulevé par M. Patterson a trait à la demande d’annulation ou de réduction de la sanction. Il ne fait aucun doute que le régime très strict de sanctions administratives pécuniaires créé par le Parlement dans le cadre de la Loi sur les SPA et du Règlement sur les SAP peut néanmoins avoir des conséquences importantes pour les Canadiens, en particulier pour une personne comme M. Patterson qui affirme ne pas être en mesure de payer cette amende élevée. Malheureusement, la Commission ne peut pas, pour des motifs circonstanciels, humanitaires ou financiers, annuler ou modifier la sanction imposée. Le pouvoir de la Commission d’accorder des réparations tire son origine de ses dispositions législatives habilitantes. Or, selon celles-ci, la Commission n’a pas le mandat ni le pouvoir d’annuler ou de rejeter un avis de violation ni d’infirmer une décision du ministre pour des motifs circonstanciels, humanitaires ou financiers.

 

[20]         Selon le dossier dont je dispose, je conclus que M. Patterson n’a pas satisfait au critère de recevabilité de la Commission en établissant l’existence valable d’un fondement susceptible de lui obtenir gain de cause en l’espèce.

 

 

Dispositif

[21]         La Commission déclare donc irrecevable la demande de révision de la décision du ministre présentée par M. Patterson et la rejette.

 

[22]         En conséquence, la décision du ministre 16‑01927 du 7 novembre 2016 est confirmée.

 

[23]         Par application du paragraphe 9(3) de la Loi sur les SAP, M. Patterson est réputé avoir commis la violation mentionnée dans l’avis de violation no 4971‑16‑0718, de sorte qu’il doit payer la sanction de 800 $ à l’Agence dans les trente (30) jours suivant la signification de la présente décision.

 

[24]         M. Patterson peut communiquer directement avec les représentants de l’Agence pour savoir s’ils conviendraient d’un échéancier raisonnable pour le paiement de la sanction.

 

[25]         Cette violation n’est pas une infraction criminelle. Dans cinq ans, M. Patterson pourra demander au ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire de rayer cette violation de son dossier, conformément à l’article 23 de la Loi sur les SAP.

 

 

Fait à Ottawa (Ontario), ce 9e jour de février 2017.

 

 

 

 

 

 

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M. Donald Buckingham, président

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